Certains connaissent le français !
Il est assez agréable de constater que des personnes en vue, estimables et tout et tout, partagent votre avis. Cette semaine, j’ai vérifié deux fois que je n’étais pas le seul Français à me montrer pointilleux sur les questions de langue française.
La première fois, c’était en page 3 du « Canard enchaîné » paru le 1er avril, sous la plume de Claude Angeli, en colonne 7, en bas de la page, avant-dernier paragraphe. Là, Angeli écrit ceci : « Les États-Unis “ne sont plus en capacité (sic) de résoudre seuls la question” ». Et ce sic me ravit, car il prouve que je ne suis pas le seul à estimer ridicule cette façon de parler, qui consiste à bannir les adjectifs (ici, capables), pour les remplacer par des expressions plus longues et ridiculement entortillées (en capacité). Combien de fois vous ai-je cassé les pieds avec ces complications injustifiées, qui font, de nos journaux, de nos radios, de nos télévisions, des rassemblements de précieuses ridicules ?
La deuxième fois, dont je crains bien qu’elle soit la seconde, a été le fait de Stéphane Bern, dans son émission sur RTL. Recevant Françoise Chandernagor, qui a écrit un roman sur un des frères de Jésus – autre sujet dont j’ai souvent parlé ici –, il a employé le verbe arguer, en le prononçant correctement, c’est-à-dire en faisant entendre le U, qui n’est pas là pour durcir la lettre G, comme le croient les incultes (telle Marguerite Yourcenar, qui avait fait la faute dans son discours de réception à l’Académie française, ce qui a dû faire frémir ses collègues), mais parce que ce verbe est de la même famille que le nom argument. C’était la première fois que j’entendais à la radio ce mot prononcé comme il doit l’être, sans qu’on le fasse rimer avec sagaie ou muguet. Stéphane sait donc lire un dictionnaire, et il connaît probablement les recommandations de ladite Académie, où je prédis qu’il entrera un jour, et qui conseille de placer un tréma sur le U pour montrer qu’on doit l’entendre.