La carrière d’un film

Publié le par Yves-André Samère

Vous avez pu le constater si vous allez au cinéma, la carrière des films en salles est de plus en plus courte : la plupart d’entre eux disparaissent de l’affiche au bout de quelques semaines... voire d’une seule quand ils sont très mauvais (c’est arrivé, par exemple avec Le tronc, premier film de Karl Zéro). Et puis, il y a les sorties en DVD et les passages à la télévision, de plus en plus proches de la sortie en salles. En effet, la loi française prévoit un délai minimal de quatre mois entre la sortie d’un film au cinéma et celle sur DVD, puis deux mois supplémentaires avant leur passage sur Canal Plus, et trois mois supplémentaires avant leur passage sur les autres chaînes. Donc un film peut sortir sur Télé-Poubelle ou France 2 neuf mois après sa sortie en salles. Il va sans dire que ces durées ont été raccourcies par le gouvernement, sous la pression des chaînes de télévision – qui ont souvent financé ces films – et des éditeurs de DVD ! Or il n’en a pas toujours été ainsi, puisque, autrefois, cette carrière en salles se poursuivait pendant des mois, des années parfois. Et l’on les cinéphiles se souviennent par exemple qu’à Paris, West side story, sorti en 1961, est resté cinq ans à l’affiche du cinéma George V, sur les Champs-Élysées !

Il faut dire qu’autrefois, et c’est encore le cas dans les pays sous-développés, un film sortait d’abord dans un petit nombre de grandes salles des villes importantes, où le prix des places était élevé : les fameuses « salles d’exclusivité ». On ne tirait par conséquent que le nombre de copies nécessaires à ce premier passage. Puis, lorsque le film avait épongé tout le public possible et que les spectateurs aisés se raréfiaient, il passait dans les salles de quartier, de deuxième catégorie, où les billets coûtaient moins cher. Enfin, il passait dans les petites villes et les salles de troisième catégorie, finissant ainsi de ratisser tout le pays. Comme mentionné plus haut, ce système fonctionne encore pour les pays pauvres : par exemple, en Afrique francophone, un distributeur national achète les films qui ont terminé leur carrière en France, à raison de deux ou trois copies délaissées chez nous, et les fait passer dans les grands cinémas de la capitale ; une semaine ou deux plus tard, le film passe dans les petits cinémas de quartier, puis dans les petites villes... où il arrive en lambeaux, les projectionnistes et les projecteurs – pas encore numériques –, dans ces pays, étant ce qu’ils sont. Ce circuit peut durer fort longtemps, mais la campagne de publicité orchestrée chez nous lors de la sortie est loin, n’a plus aucune efficacité, et le film rassemble donc d’autant moins de spectateurs que le niveau de vie est bas.

Un autre jour, si Dieu me prête vie, je vous raconterai quand et à la suite de quoi tout cela a changé. Même si vous vous fichez éperdument du cinéma, cette histoire en dit long sur notre mode de vie.

Publié dans Curiosités, Cinéma

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C
Dans les années ,47,48 etc..Hellzapoppin,un film, complètement fou est demeuré, dans un petit cinéma<br /> de l'avenue de l'Opéra ,peut-être pas autant que ,10 ans plus tard la cantatrice chauve ,rue de la Huchette<br /> mais un certain nombre de mois quand même !
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Y
Oui, mais « La cantatrice chauve », à ma connaissance, est une pièce de théâtre, pas un film. Le processus est très différent, car on n’a pas à fabriquer des copies. Avec « La leçon », elle se joue à La Huchette depuis 1957.<br /> Ce n’est du reste pas le record, puisque la pièce d’Agatha Christie, « The mousetrap », est jouée à Londres depuis 1952. On n’a pas le droit de la jouer ailleurs, mais je l’ai traduite en français. Traduction téléchargeable facilement.<br /> « Hellzapoppin », je l’ai vu plusieurs fois, quoique ailleurs. Le cinéma de l’Avenue de l’Opéra n’existe plus depuis longtemps !