Suis-je un philosophe ?
Raphaël Enthoven était aujourd’hui à onze heures sur France Inter, et ce philosophe m’a paru lumineux d’intelligence, même si je ne suis pas d’accord avec lui sur tout ce qu’il a dit.
Par exemple, je ne souscris pas à cette opinion selon laquelle, si on a des convictions, c’est qu’on n’a pas approfondi ses connaissances. À ce compte-là, il faudrait écarter les opinions de la totalité des gens qui émettent une idée. Et je ne crois pas qu’Albert Camus, par exemple, ait été un type superficiel n’ayant jamais approfondi sa notion de l’absurdité de nos existences.
En revanche, j’ai bien aimé qu’il dise ceci : un philosophe, c’est quelqu’un qui vous fait dire, à propos d’une notion qu’il expose, que, oui, bien sûr, je le savais mais je n’en avais pas conscience jusqu’ici. Or ma façon de penser est exactement celle-là, et je pointe souvent des notions que chacun PEUT percevoir mais ne voit pas, conformisme aidant.
Par exemple, si je répète de temps à autre qu’incontournable est un mot ridicule dont nous n’avons aucun besoin, ou que la technologie n’est pas la technique, ou que les États-Unis ne sont pas « l’Amérique », je suis tout à fait conscient que mes compatriotes ne sont pas sur la même longueur d’onde, ne comprennent pas pourquoi j’écris cela (alors que les dictionnaires abondent dans mon sens), et ne voient pas ce qu’ils pourraient voir.
Autrement dit, je suis un philosophe. Veuillez donc désormais me témoigner votre respect. Au temps de Richelieu ou de Loulou la Fistule, on m’aurait fait une pension.