Caméos

Publié le par Yves-André Samère

À Londres, beaucoup de salles de cinéma portent le nom de Cameo (et aussi Odeon), alors qu’en France, c’est très rare, et il semble n’y en avoir que trois, à Nancy, Metz et Avesnes-sur-Helpe – aucune à Paris. C’est que les Français, dans leur grande majorité, ne connaissent pas le mot caméo, sauf s’ils sont cinéphiles ou appartiennent aux professions du cinéma.

Un caméo est une apparition, dans un rôle minuscule, voire comme simple figurant, d’une personnalité célèbre. En général, ce personnage ne prononce pas un mot, ne figure pas au générique, et son titulaire n’est pas rétribué, car il figure dans le film à titre d’amitié pour le metteur en scène. Quant au public, il le remarque, ou pas. On connaît des dizaines de cas, mais je me contenterai de citer Romy Schneider apparaissant quelques secondes dans Plein soleil, de René Clément, et qui n’était là que parce qu’Alain Delon, avec qui elle vivait alors et qui jouait dans la scène, était la vedette du film. On a vu aussi Jeanne Moreau et Jean-Claude Brialy dans Les quatre cents coups, de François Truffaut : elle cherchait son chien, Jean-Pierre Léaud voulait l’aider, mais Brialy, qui tentait de la draguer, disait au garçon de ficher le camp. On dit aussi que Jean Marais, en poivrot anonyme, paraissait quelques secondes dans Drôle de drame, de Marcel Carné, mais il était méconnaissable, et le cas n’a jamais été confirmé. Enfin, le plus curieux, Salman Rushdie (je vous signale qu’il donne une interview importante cette semaine dans « L’Express ») est présent dans un film d’Helen Hunt, en 2007, Then she found me, en français Une affaire de famille, puis l’année dernière en invité dans River of fundament, de David Grimm et Matthew Barney, jamais sorti en France. Et n’oubliez pas Steven Spielberg dans le rôle d’un collecteur des impôts à la fin de Blues brothers !

Il arrive également qu’un réalisateur décide de figurer dans son propre film, et c’est ainsi que François Truffaut, en militaire du dix-neuvième siècle, croise Isabelle Adjani dans L’histoire d’Adèle H. C’est un gag, car il détestait l’armée ! Mais, sur ce chapitre, nul n’égale Alfred Hitchcock, qui, à court de figurants, décida un jour de paraître dans un de ses films, puis, ayant trouvé l’idée bonne, recommença de nombreuses fois (dans l’un d’eux, on le voyait à deux reprises). Or, le public l’ayant reconnu et désirant le revoir, le gag devint gênant, et il dut se résoudre à faire son apparition de plus en plus tôt, voire au tout début du film, pour ne pas détourner son attention de l’histoire. Deux fois, dans Lifeboat et dans Le crime était presque parfait, on ne le vit qu’en photo, et, dans son dernier film Complot de famille, il n’apparaît qu’en ombre chinoise derrière une vitre dépolie. Mais sa silhouette était si connue qu’on le reconnaissait instantanément ! Ce que c’est que la notoriété...

Naturellement, ne sont pas des caméos ces cas où un personnage joue pendant quelques instants son propre rôle, comme Jean Tiberi interprétant le maire de Paris au cours d’un mariage (dans 3 zéros, de Fabien Onteniente, en 2002), et Lionel Jospin dans Le nom des gens, de Michel Leclerc, en 2010. Ou encore, si un réalisateur joue un personnage à part entière, comme Fritz Lang dans Le mépris de Jean-Luc Godard, ou encore François Truffaut, vedette de Rencontres du troisième type, de Spielberg. Là, on figure au générique, et... on est payé !

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