Chobiznesse

Publié le par Yves-André Samère

Je me méfie des vedettes du showbiz, et de tout individu travaillant dans le spectacle, vedette ou pas. Dans ce domaine, il semble qu’on ne puisse pas dénicher un être sensé.

Ainsi, parmi mes rencontres, il y avait cet écrivain que le public ignorait car son style était assez obscur, mais que les critiques portaient aux nues. Il passait la moitié de sa vie en prison, car, fauché, il se nourrissait de ce qu’il volait dans les grands magasins. Il vivait avec une guenon macaque, mais dans les beaux quartiers tout de même, à deux pas de la Place des Vosges, une rue où plus tard, ruinée, vint habiter Annie Girardot. Il prétendait que les peuples du tiers-monde ne pouvaient pas avoir le sida, que c’était une maladie d’Occidental, et ne prenait donc aucune précaution dans ses voyages lointains que subventionnait son éditeur. Inévitablement, il est mort du sida, contracté en Asie.

Il y avait cet apprenti-comédien, persuadé qu’un jour, à Hollywood, Brad Pitt lui remettrait un Oscar. Sa carrière se résume à une apparition, comme figurant, dans un film obscur, où on le voyait en fond d’écran durant deux secondes, et où il n’avait pas un mot à dire. Se croyant doté d’une belle voix, il tentait de s’infiltrer dans toutes les émissions de télévision où l’on recrutait des candidats au vedettariat. Régulièrement, on le remerciait dès la première ou la deuxième éliminatoire. Un jour, il m’avait demandé, si jamais il n’était pas devenu vedette avant ses trente ans, de... le tuer. On le voyait tout le temps avec un couple de mes amis, mais, un jour, il me demanda comment ces amis s’appelaient : il avait oublié ! Et j’ai oublié de le tuer.

Il y eut cet artiste qui m’avait abordé dans la rue, parce qu’il m’avait reconnu comme ayant assisté au premier rang de son spectacle, la veille. Mais, doté d’un sale caractère – je ne lui ai connu aucun ami – et d’un ego surdimensionné qui lui interdisait d’accepter la moindre publicité car il voulait avoir du succès sans ce procédé vulgaire, il s’est fait renvoyer de partout, n’est jamais engagé à Paris, et n’a plus qu’une demi-douzaine de contrats en province pour le reste de cette année.

Il y eut cet acteur extrêmement talentueux, qui avait débuté à huit ans au cinéma, fit carrière au théâtre, au cinéma, à la télévision, joua avec les plus grands acteurs sous la direction des plus grands metteurs en scène, créa une pièce que Montherlant ne voulait pas monter jusqu’à ce qu’on trouve l’acteur adéquat (et ce fut lui, à dix-sept ans), puis, à vingt-cinq ans, décida qu’il ne voulait plus « faire l’acteur » au cinéma, se rabattit sur la télévision, puis préféra devenir décorateur, puis metteur en scène (il fit trois films dont seul le premier eut du succès), et devient enfin producteur de huit films, dont un seul eut du succès. Ne pas savoir ce qu’on veut et pour quoi on est doué, ce n’est pas très bon.

Avant-hier et hier, une vedette de la radio et de la télé, que j’avais un peu égratignée, m’a envoyé QUATRE messages, dont l’un contient son adresse personnelle : cet homme désire entamer avec moi un « dialogue ». Il prétend que j’aurais été, sur le présent site, « l’un des premiers à [le] défendre [... lorsqu’il produisait] une modeste émission, un été, il y a quelques années, sur l’antenne de France Inter, [émission qui s’appelait] Toute, toute première fois ». Je ne sais qui, de lui ou de moi, fume des substances illicites, mais je n’ai retrouvé aucune trace de cette opinion favorable, sur une émission dont j’ignorais tout, et dont j’ai su, en cherchant un peu, qu’elle avait été diffusée à vingt heures, moment auquel je n’écoute jamais la radio. Je dois avoir un homonyme... Naturellement, je ne donne pas suite : cela ne me flatte pas du tout, de fréquenter des célébrités, et je ne ressens aucune envie de m’embarquer dans une discussion dont je sais comment elle tournera : au vinaigre, après quelques rappels de mon mépris, de mon dédain, de ma haine, tous « sentiments qui [lui] sont étrangers », comme il me le rappelle aimablement, histoire de me donner une leçon.

Quelqu’un de ces jours il faut que je me pende.

Publié dans Mœurs, Cinéma, Acteurs, Radio

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T
Euh, non, ne vous pendez pas surtout!<br /> Ce "gugusse", comme on dit par chez nous pour désigner les gens célèbres de toutes sortes, s'en remettra, allez!<br /> Sa carrière ne souffrirait pas de votre silence mais vos lecteurs y verraient un manque, c'est certain.
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Y
Oh, j’ai seulement eu envie de citer Molière...<br /> <br /> « Gugusse », je pense qu’on le dit aussi à Paris. Il y en a tant !<br /> <br /> Et merci, de toute façon. Dire ce que je pense et le faire en français correct, c’est plus important pour moi que de frayer avec des célébrités.
D
Dédain, mépris et haine sont des qualificatifs qui pourraient s'appliquer à nombre de personnes, mais pas à vous, moi qui vous lis depuis le premier article de votre blog. Mais peut-être que ce monsieur veut juste, non pas gagner un admirateur car il doit avoir suffisamment de succès, mais discuter avec quelqu'un qui est lucide et ne mâche pas ses mots ? Ne savez-vous pas que ce sont les qualités les moins partagées dans son milieu ?<br /> A part cela, je ne vois pas ce qu'il gagnerait à vous fréquenter car vous êtes planqué dans les méandres des Internet, et comptez le rester.<br /> A moins que ce ne soit une personne si fragile qu'une moindre contestation de son talent le bouleverse. Dans ces cas-là, une bonne thérapie s'impose.
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Y
Merci. Mais l’analyse est bonne, en ce sens que je ne hais personne, et que je me commente de rire des ridicules des célébrités, sans aucunement « filtrer » mes cibles, et notamment, pour employer une expression que j’affectionne, celles qui « montrent leur cœur à tous les passants ». Quant à la thérapie nécessaire à ce pauvre monsieur, je le crois incurable !