Déboulonnons : Jacques Prévert
Mille regrets, je n’ai jamais aimé Jacques Prévert, et je sens que, d’avoir écrit ça, je vais me faire des ennemis. Vous savez où on peut, sans émigrer aux États-Unis, se procurer une arme ? Quoi ? Ne pas aimer le scénariste de ce film incontesté, Les enfants du paradis ?
Mais c’est que, justement, son travail pour le cinéma est le seul que j’accepte. Ce que je visais en commençant, c’est sa « poésie », alors que c’est le pire poète français – avec José-Maria de Hérédia (dont on a découvert, après sa mort, qu’il collectionnait dans un carnet des couples de rimes, et qu’ensuite, par-dessus, il écrivait des vers complétant ce premier pas, tout comme le faisaient autrefois les chansonniers se produisant dans les cabarets, lesquels d’ailleurs faisaient cela beaucoup mieux, et en improvisant leur texte en direct).
Or je viens de découvrir un texte que Michel Houellebecq a publié chez Flammarion en 1998, en le complétant en 2009, preuve qu’il lui donnait de l’importance. Cela s’intitulait Interventions, puis Interventions 2, un recueil d’articles déjà parus. Et j’y trouve un court chapitre dont le titre est Jacques Prévert est un con, qui avait été d’abord publié dans Les lettres françaises, numéro 22, le 22 juillet 1992. Merveille, on y trouve ces quelques douceurs :
- Ses poèmes regorgent pourtant de ces jeux de mots stupides qui plaisent tellement chez Bobby Lapointe.
- Aujourd’hui cependant il entre à la Pléiade, ce qui constitue une seconde mort. Son œuvre est là, complète et figée. C’est une excellente occasion de s’interroger : pourquoi la poésie de Jacques Prévert est-elle si médiocre, à tel point qu’on éprouve parfois une sorte de honte à la lire ?
- Ce qu’il a à dire est d’une stupidité sans bornes ; on en a parfois la nausée.
- Si Jacques Prévert est un mauvais poète, c’est avant tout parce que sa vision du monde est plate, superficielle et fausse. Elle était déjà fausse de son temps ; aujourd’hui sa nullité apparaît avec éclat, à tel point que l’œuvre entière semble le développement d’un gigantesque cliché. Sur le plan philosophique et politique, Jacques Prévert est avant tout un libertaire ; c’est-à-dire, fondamentalement, un imbécile.
Tout cela m’amuse prodigieusement, car, si je n’aime pas non plus Houellebecq (qui n’est qu’un provocateur à ne surtout pas prendre au sérieux), même un écrivain médiocre et de mauvaise foi peut, de temps à autre, écrire une vérité.
(Ne me renvoyez pas la balle, je ne me considère pas comme un écrivain)