Menuisier caresseur
Je viens de jeter un coup d’œil sur un livre « acquis » récemment. Il s’agit de L’Évangile selon Pilate, d’Éric-Emmanuel Schmitt. Et comme, aimant rire, je suis très friand des écrits de ces gens qui parlent de ce qu’ils ne connaissent pas, je vous dirai que, dès le troisième paragraphe de la première page, je suis tombé sur cette phrase, censée écrite par Jésus : « Le menuisier caresse la croix sur laquelle je vais sans doute saigner demain ».
L’auteur aurait dû se renseigner ! Selon le texte prétendu sacré, Jésus a comparu dans la matinée devant Ponce Pilate, dans le Palais que ce procurateur occupait lorsqu’il se rendait à Jérusalem – sa résidence habituelle étant à Césarée. Or il est impossible de croire que ce palais, qui avait été celui du roi Hérode précédemment, ait pu servir d’entrepôt pour instruments de supplice. Est-ce que Giscard conservait à l’Élysée la guillotine qui a servi à décapiter ce pauvre Christian Ranucci, auquel il a refusé sa grâce ? D’ailleurs, il est bien connu que les Romains ne déplaçaient pas les croix, on laissait en place le mat central, et seule la poutre horizontale, le patibulum, était transportable par les condamnés. Et rien ne dit que Jésus y a été cloué, car, le plus souvent, le condamné était attaché par des cordes bien serrées. Donc il ne saignait pas.
Par conséquent, il est ridicule d’imaginer qu’un menuisier ait pu, avant la condamnation, « caresser la croix » qui devait servir à crucifier Jésus. En outre, ce n’est pas le lendemain que celui-ci a été crucifié, mais l’après-midi même, une ou deux heures après sa condamnation.
Pour couronner le tout, dans ce récit, Jésus évoque son enfance à Nazareth... où il n’a jamais vécu, car cette bourgade n’existait pas à son époque. Du reste, Joseph, son père adoptif, qui était charpentier, n’aurait pu y trouver de travail.
Bref, Schmitt écrit des sottises.
Au fait, cela ne vous a jamais étonné que TOUTES les images de la crucifixion de Jésus le montrent affublé d’un pagne ? C’est totalement contraire à la vérité historique, car les condamnés étaient tout nus. Un seul artiste a représenté Jésus entièrement nu, c’est... Michel-Ange, et il avait 17 ans ! Il est vrai que – voyez la Chapelle-Sixtine – les nus masculins ne lui faisaient pas peur. La photo est due à un photographe italien, très talentueux, Francesco Bini, qui a pris le pseudo de Sailko, et il y en a une autre ICI. La statue est en bois polychrome, et se trouve à Florence, dans la Basilique Santo Spirito, sous les orgues.