La « fête » de la musique ?
Tout à l’heure commencera la soirée la plus sinistre de l’année, celle de la fête de la musique. Je comprends assez mal cette déification de tout ce qui sert à faire du bruit, de préférence inécoutable. Avez-vous déjà constaté, dans les radio-télés, qu’on ne demandait PAS à un invité quelle musique il écoutait « en boucle » (variante, au temps où cette pauvre Isabelle Giordano, qui n’avait pas inventé l’eau tiède, demandait à TOUS ses invités sur France Inter « Qu’est-ce que vous avez sur votre iPod ? », étant entendu qu’on ne pouvait pas posséder autre chose que le bidule d’Apple pour s’enchanter les esgourdes).
Moi, je rêve d’entendre un invité, faisant preuve pour une fois d’un peu d’audace, répondre : « De la musique ? Mais je n’en écoute jamais, ça me casse les pieds, je préfère le silence ! ». Mais non, aucun n’osera, sous peine de passer pour un Béotien ou pour un mélenchon (je ne mets pas de majuscule, exprès). Et ces écrivains qui affirment ne pouvoir écrire sans écouter de la musique, du rap de préférence ! Qui peut croire un bobard de cette taille ?
N’en concluez pas que je déteste la musique. J’en écoute, mais de la bonne, du classique, de Bach à Gershwin, de Chopin à Beethoven, de Schumann à Tchaïkovsky, de Gounod à Mozart, sans oublier le jazz (Count Basie, Ella Fitzgerald, Erroll Garner, Louis Armstrong, Art Tatum, Duke Ellington, Scott Joplin), l’éventail est large : pourquoi viserais-je plus bas ? Quand vous allez au restaurant et qu’on vous propose un gratin dauphinois ou des œufs à la cubaine, vous réclamez plutôt un hamburger ? Et lorsque je condescends à écouter de la variété, il y a le choix : de Brassens à Brel en passant par Thomas Fersen, Juliette Noureddine ou Pierre Perret, Souchon ou Henri Salvador, tout ça est de qualité supérieure, qui ridiculise la variétoche dont on encombre les ondes. Et puis, il y a toujours Queen !
Alors, ce soir, chaleur ou pas, je ferme mes fenêtres. Je transpirerai peut-être, mais dans le silence.