Les titres peu imaginatifs

Publié le par Yves-André Samère

Dans son livre Théorie du bordel ambiant, Roland Moreno, cet esprit en éveil (c’est lui, l’inventeur de la carte à puces), lance quelques piques sur ces auteurs qui donnent en titre, à leurs livres ou à leurs pièces de théâtre, le nom de leur personnage principal, faisant ainsi preuve d’un certain manque d’imagination, surprenant chez les génies les moins contestables.

Et c’est vrai que nous croûlons sous les Georges Dandin (Molière), Marion Delorme (Victor Hugo), Phèdre (Racine), Cyrano de Bergerac (Edmond Rostand), Eugénie Grandet, (Balzac), Graziella (Vigny), Kean (Sartre et Alexandre Dumas fils), Annibal (Marivaux), Caligula (Albert Camus), Jack (Alphonse Daudet), Hamlet, Macbeth, Othello, Titus Andronicus (Shakespeare), Peer Gynt (Ibsen), pour ne rien dire d’Emmanuelle (Emmanuelle Arsan), Justine (Sade), Manouche (Roger Peyrefitte), Robinson Crusoe (Daniel DeFoe), Maria Chapdelaine (Louis Hémon), Marius, Fanny, César, Topaze, Merlusse, Naïs (Pagnol, un spécialiste), Jean-Christophe (Romain Rolland), Kim (Rudyard Kipling), Lucien Leuwen (Stendhal), Savrola (Churchill), Frankenstein (Mary Shelley), et j’en oublie quelques centaines.

Nous n’y faisons plus attention, et il y a pour cela quelques raisons. D’abord, on passe facilement aux grands auteurs, et aux moins bons dans la foulée, quelques petites faiblesses. Et surtout, certains noms sont si bien entrés dans le langage courant que nous n’en imaginons plus d’autres en guise de titre. Ne dit-on pas « un tartuffe » pour désigner un hypocrite ? Pourtant, cet argument ne tient pas vraiment la route, puisqu’on dit tout aussi couramment « un harpagon » alors que L’avare ne porte pas en titre le nom du personnage principal. Il n’y a donc aucune nécessité pour un auteur de ne pas chercher un titre plus parlant.

Et, il fallait s’y attendre, le cinéma s’est engouffré dans la brèche !

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