Discrète révolte sur une scène
Le monde théâtral se mettrait-il à ruer dans les brancards et à manquer de respect aux modes langagières encouragées par Sa Majesté Emmanuel Ier ? J’ai visionné aujourd’hui une vidéo de la pièce de Molière, l’avant-dernière, rebaptisée Trissotin ou les femmes savantes – le titre original était seulement Les femmes savantes –, mise en scène au Théâtre de la Criée à Marseille par Macha Makeïeff. Or un vers a été modifié subtilement, et on ne s’en aperçoit que si on est attentif : c’est le vers 584, « Elles veulent écrire et devenir auteurs », et le comédien, Louis-Do de Lencquesaincq dans le rôle de Chrysale, au lieu de dire le dernier mot sans le modifier, prononce « auteure » en appuyant ostensiblement sur la dernière syllabe -re, qui n’est évidemment pas dans le texte de Molière, et ne rime pas avec le vers précédent, qui se terminait par mœurs ! Il est vrai que le personnage de Chrysale est le contraire d’un féministe, et que la tirade qu’il débite à ce moment-là est une satire des femmes de l’époque !
Impossible de croire au hasard, l’intention ironique est évidente. L’enregistrement a été fait en juin de cette année. Je me sens moins seul, soudain.