Bobards de cinéastes

Publié le par Yves-André Samère

Dans mon site sur le cinéma et peut-être ici, j’ai quelquefois écrit que les plus grands menteurs de la Terre étaient les réalisateurs de cinéma. Sans doute considèrent-ils que leur travail de créateur comprend également les bobards sur leur travail, et même sur leur existence personnelle.

Par exemple, François Truffaut a souvent parlé de son enfance difficile, dans une famille du peuple et avec des parents déficients. Mais il n’a jamais dit que son père était architecte, et que sa mère, très caricaturée dans son premier long métrage Les quatre cents coups, portait un nom aristocratique, Jeanine de Montferrand !

Ingmar Bergman, lui, œuvrait dans un style différent : sous un pseudonyme, il écrivait et publiait des critiques de cinéma, dans lesquelles il démolissait ses propres films. Au fond, il manifestait dans sa vie réelle un humour qu’on ne trouvait jamais dans ses œuvres.

Claude Chabrol, de son côté, a raconté comment son accessoiriste, afin que la mouche que lui-même désirait faire marcher sur un miroir suive un trajet imaginé à l’avance, avait introduit un aimant dans l’anus de la mouche, ce qui permettait de la diriger avec un second aimant depuis l’envers du miroir.

Hitchcock, toute sa vie, a raconté à la totalité des journalistes qui l’interviewaient, que, lorsqu’il avait cinq ou six ans et avait commis une bêtise de gosse, son père l’avait envoyé au commissariat du quartier, avec une lettre pour le commissaire, dans laquelle il lui demandait d’enfermer son fils dans une cellule pendant quelques minutes, et que le commissaire avait obtempéré !

Orson Welles, pour sa part, a raconté que, désirant faire un film alors qu’il n’avait aucun scénario, il avait téléphoné au patron des studios Columbia, Harry Cohn, et lui avait raconté qu’il avait une histoire formidable à lui proposer, si Cohn lui envoyait 50 000 dollars. Et comme ledit patron lui demandait des précisions, il aurait donné un nom au hasard, le titre d’un roman à quatre sous qu’il voyait, depuis sa cabine, sur une table, parmi d’autres romans. Et qu’ensuite, Cohn ayant accepté la proposition et envoyé l’argent, il n’avait plus eu qu’à écrire lui-même un scénario policier pour un film intitulé La dame de Shanghai. L’ennui est que le film portant ce titre et qu’il a réalisé ensuite venait bel et bien d’un mauvais roman policier qui existait, If I should die before I wake  (en français, Si je devais me réveiller avant de mourir), et qu’il n’avait pas écrit. Ce livre avait pour auteur Sherwood King, ce que même les deux génériques du film révèlent. Et comme le film, qui consterna tout le monde, a été terminé par les studios et que Welles n’en a pas fait le montage, le bobard se révèle tout seul !

(NB : j’ai commandé ce livre, de sorte que je pourrai vérifier si l’histoire est bien la même que dans le film)

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