C’est Polanski, qu’on devrait accuser !

Publié le par Yves-André Samère

Je n’irai pas voir J’accuse, film qui sort demain, et qui est un film malhonnête, d’ailleurs inspiré d’un roman à suspens de Robert Harris, dans lequel Polanski, son réalisateur, se cache derrière le personnage de Dreyfus.

D’abord, on y a éliminé l’action collective des défenseurs de Dreyfus (il n’y a pas eu seulement Émile Zola et Clemenceau !), et les dreyfusards étaient nombreux. Mais il ne montre jamais l’existence d’un soutien populaire au condamné de l’île du Diable. Or, à cette époque, c’est quasiment toute la France qui était antijuive, et les manifestations hostiles abondaient.

Mais Polanski, sans trop se cacher, plaide sa propre cause, qui est et reste indéfendable : non seulement il a été condamné aux États-Unis pour avoir drogué puis violé par sodomie une jeune fille de treize ans, il est aussi, depuis peu, accusé de viol par six autres femmes, dont, récemment, la photographe Valentine Monnier. Ce coup de torchon n’est pas seulement destiné à rendre son film plus rythmé et plus efficace en cachant les détails gênants, il vise aussi et surtout à retourner l’accusation contre tous ceux qui ont tenté de le renvoyer devant la justice des États-Unis, pays qu’il a fui illégalement sous un prétexte (tourner un film en Europe en promettant de revenir ensuite pour terminer sa peine, ce qu’il s’est bien gardé de faire !).

Rappelons aux distraits que Polanski a été jugé pour six motifs : avoir fourni de la drogue à une mineure, s’être livré à des actes licencieux et de débauche, s’être rendu coupable de relations sexuelles illicites, de perversion, de sodomie et de viol. Pour éviter un procès public, son avocat avait négocié avec l’accusation, et un seul chef d’accusation avait été retenu, les rapports sexuels illégaux avec une mineure. Mais on n’avait pas prévu qu’après un séjour en prison de six semaines alors qu’il avait écopé de trois mois de prison, il s’enfuirait et ne remettrait jamais les pieds aux États-Unis.

Bref, Polanski reste ce qu’il est depuis le début, un violeur dont la place est en prison.

Écrire ci-dessous une ânerie quelconque :

D
Ce qui est évident dans les nouvelles accusations, c'est le fait que ces femmes, quand les faits se sont produits, étaient très jeunes, si ce n'est mineures. Comme sa victime aux Etats-Unis. Il ne peut que nier, bien sûr, d'autant que ces faits sont prescrits.<br /> Je pense aussi qu'il est très difficile pour une jeune fille de dénoncer de tels faits si traumatisants, d'autant que le violeur est un homme très connu, avec un pouvoir et un ascendant qui doivent paralyser toute velléité de plainte si elle avait voulu le faire.<br /> Cependant, et je sais que vous n'êtes pas d'accord avec moi, je sépare l’œuvre des agissements de son auteur. Je ne connais pas particulièrement les films de Polanski, mais je n'irai pas le voir car d'après ce que j'ai pu entendre sur France Culture, il y a beaucoup d'inexactitudes historiques.
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Y
Être jugé comme une personne lambda, c’est la théorie. En pratique, ça n’arrive quasiment jamais. Pour ce qui me concerne, un artiste qui mérite d’être jugé et condamné, je ne m’intéresse pas à son œuvre. Je déteste et je ne lis pas Céline. Idem pour Polanski. Des artistes respectables, cela ne manque pas.
D
Pour ce qui concerne "l'artiste" qui serait au-dessus des lois, bien sûr que face à un crime ou un délit, il doit être jugé comme une personne lambda. Mais on peut apprécier l’œuvre et rejeter son auteur. Ou ne pas aimer les deux !
D
Ce n'est pas un "prétexte", c'est une constatation : ces jeunes femmes et même ces femmes sont paralysées par la notoriété et le poids social de ces hommes, le combat pour elles paraît perdu d'avance. Celles qui ont le courage de dénoncer ont raison de le faire le plus tôt possible, mais il y a tellement d'enjeux : l'employée qui risque de perdre son poste si elle dénonce son chef, la femme qui se retrouve sans revenus après l'arrestation de son mari, la jeune actrice qui voit sa carrière stoppée tout net, etc... elles sont en position de faiblesse, ce qu'exploitent les salauds.<br /> Car bien souvent les femmes abusées sont fragiles, soit par leur jeunesse, soit par leur statut. Ils ne s'attaquent pas aux femmes indépendantes qui n'ont besoin de personne pour vivre.<br /> Ce qu'il faudrait, c'est un accueil plus humain pour les plaignantes, avec un vrai accompagnement (relais d'associations, de médecins, etc.). Hélas, bien souvent c'est "parole contre parole" : la justice dans ces cas-là ne peut pas faire grand chose, s'il n'y a pas de preuves (hématomes, lésions, etc) d'où l'intérêt de dénoncer le plus tôt possible pour que le médecin légiste puisse établir un procès-verbal.
Y
En somme, sous prétexte qu’un homme est riche, célèbre et considéré comme un « artiste », il ne devrait jamais être puni ? Et s’il commet un crime, la sanction devrait être laissée à l’appréciation d’un public sentimental et facile à duper ? C’est ainsi qu’on fabrique un Benalla, un Mitterrand, un Tiberi ou un Balkany. Je serais curieux de voir comment le législateur rédigerait une loi d’exception qui généraliserait un texte pareil ! C’est sans doute la raison qui fait qu’elle reste à l’état de « non écrite » !
D
J'aimerais avoir votre certitude : quand vous êtes "femme au foyer" avec un ou deux enfants, sans avoir la possibilité d'être autonome... ce n'est pas si facile.<br /> Celles qui peuvent le faire, hélas, sont celles qui subviennent à leurs besoins. Je désespère quand une jeune femme me dit qu'elle compte vite se marier pour "arrêter de travailler". Si si, c'est plus courant qu'on ne croit.
Y
Difficile de le dénoncer ? Bien sûr, jusqu‘aujourd’hui. À présent, les femmes osent parler, et ce n’est pas trop tôt.