Louma, Drone, Steadicam

Publié le par Yves-André Samère

Dimanche soir, j’ai regardé sur France 3 un épisode de la série policière Barnaby. Or cette histoire criminelle comportait au moins deux assassinats commis par l’intermédiaire d’un drone. Les drones, vous connaissez certainement, ils servent beaucoup à la télévision comme au cinéma, et les émissions Secrets d’Histoire, présentées par Stéphane Bern, ne peuvent plus s’en passer, car ces mini-hélicoptères pilotés à distance et très légers sont souvent munis d’une caméra qui permet des vues aériennes très réussies.

On croirait volontiers que les drones sont des inventions récentes, mais ils ont été inventés et utilisés en... juillet 1917, et on les destinait alors à l’armée, qui s’en est désintéressée ! Oubliée, cette invention est redevenue à la mode dans les années 2000. On en vend à la FNAC, figurez-vous, mais leur usage est très restreint par la loi, et on comprend très bien pourquoi si on y réfléchit un peu.

Avant les drones, le cinéma a beaucoup utilisé une autre invention, la Louma. Il s’agit là d’une caméra fixée au bout d’un bras articulé très long, et qui permet à l’appareil de prise de vue, une grue perfectionnée, de se déplacer dans tous les sens, sans devoir être porté par un cadreur. Imaginez si Jacques Demy avait disposé d’une Louma pour filmer la séquence dansée dans Les demoiselles de Rochefort, lorsque la caméra traverse toute la place centrale de Rochefort, avant de s’approcher d’un immeuble (qui est devenu plus tard la mairie de la ville), d’entrer par la fenêtre et d’évoluer à l’intérieur de l’appartement où les « jumelles nées sous le signe des Gémeaux » enseignaient le chant et la danse à leur jeunes élèves. Mais, en 1967, la Louma, dont le nom est composé à partir du nom de ses deux inventeurs français, Jean-Marie Lavalou et Alain Masseron, n’existait pas encore. C’est son utilisation par Spielberg, pour son film 1941, qui lui a valu sa célébrité. Aujourd’hui, elle est utilisée partout, et j’ai souvent vu une Louma en action lors du tournage du Vrai Journal de Karl Zéro, en 1999 et 2000, dans un studio de Radio France.

Entre ces deux inventions capitales, il y eut aussi la (ou le) Steadicam, inventé(e) en 1948 par Garrett Brown, une caméra portée par un harnachement assez compliqué et plutôt lourd, permettant au cadreur de filmer sans à-coups, et supprimant les plans catastrophiques dus à la prise de vue en « caméra à l’épaule », comme disent les critiques ignares, et qui font penser aux œuvrettes commises par de jeunes serins auxquels on a offert un caméscope, dont jamais ils ne feront rien de bon. Les steadicamers sont payés assez cher, car le métier est pénible, et le cadreur doit souvent être secondé par un guide qui l’aide à filmer en reculant. Une grande réussite, L’arche russe, d’Alexandre Sokourov, entièrement filmé dans le musée de l’Ermitage de Saint-Petersbourg, durait une heure et demie et ne comportait d’un seul plan. Auparavant, les caméras pesaient des tonnes, et la caméra Technicolor utilisée par Hitchcock pour son film La corde pesait... trois cents kilos ! Inutile de dire qu’alors, il n’était pas question de la porter.

Résumons : trois inventions capitales en un siècle ! Le cinéma ne fait pas dans la rapidité.

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