Jouer avec son papa
Le comédien metteur en scène Daniel Mesguich, qui joue en ce moment une pièce avec son fils William, est invité dans une émission de France Inter. L’une des chroniqueuses de l’émission est Marion Ruggieri, et elle ne tarde pas à dégainer dans le style nunuche en parlant à William de « [son] papa ». Les deux acteurs ne bronchent pas. Un peu plus tard, remarquant que le fils parle de son père en disant « Daniel », elle s’insurge : « Comment ! Vous appelez votre père par son prénom au lieu de “papa” ? ». Le fiston apostrophé fait gentiment remarquer qu’à la ville, il appelle son père comme il veut, mais qu’ici, ils sont présents à titre professionnel.
Ces deux acteurs sont bien patients. Surtout le fils, qui aurait pu remettre la demoiselle à sa place. On pouvait dire, ô Dieu, bien des choses en somme [...]. Par exemple, tenez :
– Mademoiselle, tout à l’heure, je n’ai pas relevé quand vous avez parlé de « mon papa ». J’ai eu tort de ne pas vous rétorquer que nous ne sommes pas dans une émission de Michel Drucker, que nous ne nous adressons pas à un public de gâteux, et que vous parlez à deux comédiens, partenaires à la scène ; non à un petit garçon qui joue avec son papa. Je sais bien que la mode est à la pipolisation, qu’il faut fournir à l’auditeur sa ration de détails sur la vie privée des personnages publics, et que vous attendez de nous cette sorte d’attendrissement niais qui vous semble indispensable. Eh bien, désolé, j’appelle mon partenaire par son nom comme je le ferais pour un collègue étranger à ma famille, et la façon dont je lui parle en privé ne regarde que nous.