Mater le tréma
On dit que les Français ne savent pas quoi faire du tréma. En particulier, qu’ils ignorent où et quand on doit le placer.
C’est pourtant simple : le tréma a été inventé pour attirer l’attention sur une lettre qu’on oublierait de prononcer s’il était absent. Ce qui est le cas de certains mots où une voyelle suit un « u », dont on peut croire qu’il n’est présent que pour durcir la lettre « g » : on a tendance à oublier de prononcer ce « u ». L’exemple le plus frappant est le verbe aiguiser : il n’y a pas un Français sur un million qui sache que le « u » se prononce, comme dans aiguille. Pourtant, c’est logique, ces deux mots viennent de l’adjectif aigu.
La règle ancienne tendait à placer le tréma sur la lettre qui suivait le « u », et à écrire par conséquent ambiguïté. Aujourd’hui, l’Académie française conseille plutôt de le placer carrément sur le « u » lui-même (on écrira ainsi ambigüité), et surtout, de l’introduire dans les mots où on l’avait oublié, comme le verbe arguer, que quatre-vingt-dix-neuf personnes sur cent prononcent mal, en le faisant rimer avec reggae ou sagaie, alors que ce mot est de la même famille que le nom argument, où le « u » s’entend. Donc on peut (et il vaut mieux) écrire argüer.