Encore Orelsan
Internet a ceci de particulier, qu’il permet à n’importe qui d’exhumer un fait insignifiant et oublié depuis des années, et, en le montant en épingle, d’en faire un semblant de sujet d’actualité. Ainsi de cette chanson que le rappeur Orelsan avait composée il y a trois ans, je crois, qu’il n’a jamais chantée en public et n’a pas enregistrée. Il n’en a existé qu’un clip vidéo, mais, à l’époque où ce clip fut tourné, YouTube et DailyMotion n’avaient pas la notoriété qu’ils ont aujourd’hui (je ne suis même pas certain qu’ils existaient), de sorte que ce clip n’avait été vu par personne ou presque. Puis quelqu’un, il y a un mois ou deux, l’a ressorti, et c’est ainsi qu’on a fait un objet de scandale d’un minuscule fait qui ne signifiait rien.
Résultat subsidiaire, pour avoir écrit deux modestes notules qui tentaient de remettre les choses en place, j’ai reçu un certain nombre de commentaires, que je me suis bien gardé de valider, pour ne pas verser d’huile sur le feu. Ils contenaient, soit des accusations sans preuve, soit des revendications féministes, comme, hier, celle émanant d’une lectrice de Puteaux qui pense user d’un argument valable en affirmant que les femmes représentent 53 % de la population – ce qui est complètement hors sujet.
En fait, tous ces visiteurs, qui sont surtout des visiteuses, réagissent en mauvais mathématiciens, en se basant sur un syllogisme boiteux, tel cet Anglais qui, débarquant à Calais et voyant une femme rousse, rentrait aussitôt dans son pays pour proclamer que TOUTES les Françaises étaient rousses ! En clair, c’est prendre la partie pour le tout.
Alors, mettons les points sur les « i » : dans sa chanson Sale pute, Orelsan n’a pas « insulté » TOUTES les femmes, il a invectivé UNE femme, d’ailleurs imaginaire. On ne peut en tirer aucune conclusion, ni lui faire un procès d’intention. Et l’on peut trouver curieux que mes visiteuses veuillent assimiler les femmes en général à CETTE femme infidèle !
Puis-je rappeler que dans sa pièce, L’avare, Molière fait dire à Cléante, le fils d’Harpagon, qui entendait lui prêter (par un intermédiaire) de l’argent « au denier quatre », c’est-à-dire à 25 %, cette réplique : « Comment diable ! Quel Juif, quel Arabe est-ce là ? C’est plus qu’au denier quatre ». Faudrait-il que les Juifs et les Arabes tentent de faire interdire L’avare ?