Aéroport : Ayrault va reculer
Bien sûr qu’Ayrault va reculer, et remiser « son » projet de second aéroport nantais dans l’armoire des idées idiotes. Patience...
D’abord, ce n’est pas son projet. Il y a plus de quarante ans que cette idée est dans l’air. Mais quand elle est née, on ne souciait pas de réchauffement climatique, qui n’existait pas (est-ce qu’il existe seulement aujourd’hui ?), préserver la biodiversité en s’abstenant de détruire l’environnement des animaux relevait d’une lubie de quelques écolos (je ne dis pas qu’ils avaient tort), et on ne se souciait pas non plus de sauvegarder les zones humides comme le bocage où tout cela doit se passer dans le cas présent. Et les écologistes n’étaient pas non plus au gouvernement !
Je ne suis pas en train de dire que la mère de Térébentine Duflot va terroriser Hollande et son Premier ministre en menaçant de démissionner : aucun danger, ses convictions, elle les a mises au placard en recevant son maroquin. Mais enfin, dites-moi, vous avez déjà vu un gouvernement qui ne recule pas devant la pression de la vox populi ? Or ce projet d’aéroport est plutôt impopulaire, c’est le moins qu’on puisse dire, et pas seulement chez les agriculteurs qu’on veut mettre hors de chez eux. Non, je ne vais pas vous ressortir le Larzac comme ils le font tous dans les médias, mais je vous rappellerai que Mitterrand a reculé devant la rue sur la tentative de son ministre de l’Éducation nationale de rogner les crédits publics accordés à l’enseignement privé – c’est le ministre qu’il a rogné –, et que même De Gaulle a mis son autorité dans sa poche avec son mouchoir par-dessus, en mai 1968. Et de la manière la moins glorieuse.
Rappel à ceux qui dormaient pendant mon cours précédent : en mai 1968, la France est en état de grève générale, et les étudiants sont dans la rue. Pris de pétoche, le grand général... disparaît pendant deux jours ! Les Français ne savent plus où diable se cache leur président. En fait, il s’était carapaté à Baden-Baden, en Allemagne, où résidait le général qui commandait les troupes d’occupation françaises dans ce pays. Ce général, Jacques Massu, il l’avait envoyé dans cet exil pour le punir d’avoir trop parlé dans une interview avec un journaliste... allemand, au sujet de l’Algérie où Massu avait été commandant des troupes françaises à Alger, en même temps que préfet – bizarrerie jamais vue.
Lors de l’entrevue à Baden-Baden, De Gaulle supplie Massu de lui prêter main forte en cas d’insurrection en Fance, et Massu, qui n’attendait que cette occasion de lui faire un peu de chantage et de prendre sa revanche, lui a mis le marché en mains : c’est d’accord, mais vous libérez les camarades que vous avez fait condamner à la prison à vie. Il visait surtout le général Salan, incarcéré pour perpète à Tulle parce que De Gaulle n’avait pas réussi à le faire condamner à mort par le Haut Tribunal Militaire pourtant créé spécialement pour cette tâche glorieuse – du coup, de rage, il a dissous le Tribunal ! Et, face à Massu qu’il tenait pour « un con » (authentique : « Alors, Massu, toujours aussi con ? – Toujours gaulliste, mon général ! »), De Gaulle a mis les pouces. On a ouvert les portes de la cage tullienne, et on a même rendu leurs droits à la retraite à TOUS les officiers qui avaient été condamnés à cause de l’Algérie. Une bonne amnistie là-dessus a interdit qu’on évoque désormais les faits qui leur avaient été reprochés.
Alors, si De Gaulle, qui n’avait à la bouche que l’autorité de l’État, pouvait céder devant les étudiants et face à un général qu’il avait limogé, ce pauvre Ayrault, vous imaginez...