Bourdes scénaristiques (suite)

Publié le par Yves-André Samère

Pourquoi ne pas en remettre une couche quand un scénariste s’avère calamiteux ? Le public a le droit, puisqu’il paye sa redevance, de dire qu’il n’est pas satisfait de la camelote qu’on lui a refilée : cela relève de la défense du consommateur.

Donc, le téléfilm dont j’ai décortiqué le dialogue, Le septième juré, nous montre un avocat incitant le meurtrier présumé qu’il défend à plaider coupable, afin d’éviter la condamnation maximale, qui, en 1963 (le procès commence à l’automne de cette année-là), est la décapitation par la guillotine. Ce type de procédure existe dans les pays anglo-saxons, mais aussi en Suisse depuis le 5 octobre 2007, et en France, depuis le 1er octobre 2004. Chez nous, on l’appelle d’ailleurs « comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité », car nous aimons bien les formules compliquées.

Ce système, abondamment utilisé aux États-Unis afin d’éviter les frais – et les délais – d’un procès normal, consiste en ceci : vous reconnaissez être coupable de ce dont on vous accuse, et, en échange, on vous applique une peine réduite, qui est négociée entre le procureur et votre avocat. Votre procès est ainsi remplacé par une entrevue entre ces deux hommes et s’apparente à un pur marchandage. Si vous acceptez la peine, tout est dit, vous l’accomplissez, et vous ne verrez ni juge ni jurés. Tout cela a été décrit dans plusieurs films et plusieurs romans, dont le meilleur me semble être La défense Lincoln (en V.O., The Lincoln lawyer), film de Brad Furman, sur un scénario de John Romano, d’après le roman de Michael Connelly – auteur très connu et que je vous engage à lire.

Oui, mais voilà, dans notre téléfilm, l’action se situe en 1962 et 1963, en France, et ce dispositif juridique n’existait pas alors ! Il s’en est fallu de plus de quarante ans, voir plus haut. Le scénariste devrait plutôt écrire des histoires sur les voyages dans le temps...

L’autre bourde du téléfilm réside dans une erreur grossière commise par l’avocat de la défense : il sait que l’un des jurés est favorable à la condamnation de son client, donc il a l’intention de le récuser. Or, lorsque ledit juré est présenté, l’avocat, décrit comme un homme intelligent, a pourtant eu la bêtise d’en récuser déjà cinq, ce qui est le maximum autorisé par l’article 298 du Code de procédure pénale : « Lorsque la cour d’assises statue en premier ressort, l’accusé ne peut récuser plus de cinq jurés et le ministère public plus de quatre. Lorsqu’elle statue en appel, l’accusé ne peut récuser plus de six jurés, le ministère public plus de cinq ».

Si jamais vous étranglez une fille, choisissez de préférence un avocat qui connaît le Code ! Moi, je fais toujours attention.

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