Comment annoncer une pénurie
À onze heures du matin, France Inter annonce que tous les exemplaires de « Charlie Hebdo » ont été vendus « en trois heures ». On peut se fier à Inter Bourdes pour faire des enquêtes très poussées avant de lancer sur les ondes des nouvelles notoirement fausses.
Je n’ai aucune peine à décrypter le processus : on considère, à la radio nationale, que les kiosques à journaux ouvrent à huit heures, or le bulletin d’information est à onze heures. On en déduit par conséquent que le stock de journaux, dont on sait bien qu’il est épuisé, a été vendu en trois heures, une simple soustraction suffit. Or, ce matin, les kiosques étaient ouverts bien avant huit heures (j’ai déjà écrit, pour l’avoir constaté de visu, que deux kiosques de mon quartier étaient ouverts beaucoup plus tôt, par exception, et j’ai su ensuite par son tenancier qu’un autre avait ouvert à six heures et demie). Autre détail, que les prodigieux enquêteurs de France Inter semblent ignorer, c’est que les kiosques ne reçoivent que VINGT exemplaires de « Charlie Hebdo », pas un de plus. Et, vu les circonstances, ces vingt exemplaires sont vendus en moins de deux minutes !
Trois heures, qu’y disaient...
J’ai fait rire mon kiosquier en lui déclarant d’emblée que je ne lui demandais pas le journal que tout le monde désire (en vain) s’arracher ce matin, mais seulement « Le Canard enchaîné » –, qui, lui, est trop convenable pour jamais servir de cible aux terroristes. Il m’a remercié pour mon choix non conformiste, et révélé que des clients déçus et frustrés l’avaient insulté pour être repartis bredouilles. C’est très révélateur du fameux « esprit Charlie ».