Contre la prétendue 3D

Publié le par Yves-André Samère

Je suis ouvertement hostile aux films en relief, procédé rebaptisé aujourd’hui « 3D ». Pour deux raisons, « dont chaque est suffisante seule », aurait dit le Cyrano d’Edmond Rostand.

D’abord, c’est une arnaque : les directeurs de salles vous font payer deux ou trois euros la prétendue location des lunettes… qu’on vous reprend à la sortie. C’est donc une vente déguisée, doublée d’une confiscation arbitraire du bien acquis. On attend les plaintes en justice, que les margoulins ont jusque ici évitées parce que les sommes en jeu sont faibles, mais il suffirait qu’une association de consommmateurs s’en mêle... Or le film que l’on projette n’est même pas en relief comme annoncé. Expliquer en quoi c’est du faux relief prendrait ici trop de place, et je ne suis pas certain que vous auriez la patience de lire l’explication. Contentons-nous de dire que vous voyez en fait des objets plats comme des affiches, mais positionnés sur différents plans. Aucune sensation d’épaisseur, car celle du vrai relief n’est pas uniquement due à la vision binoculaire – pourtant la seule que le procédé courant des deux caméras couplées soit capable de fournir.

Ensuite, lesdites lunettes pèsent leur poids, et rien n’est prévu pour les fixer si vous portez DÉJÀ des lunettes : elles vous glisseront constamment sur le nez, et vous devrez les soutenir d’un doigt si vous voulez qu’elles restent en place pendant tout le film. Agréable…

Finalement, c’est un gadget. D’ailleurs, c’est bien ce qu’a déclaré Michel Ciment, le meilleur critique de cinéma que nous ayons chez nous : un puits de culture, et du bon sens à revendre. Il fait par ailleurs observer que le procédé est loin d’être nouveau, puisque Hitchcock en personne avait réalisé un film en relief, en… 1954 ! Il s’agissait de Dial M for murder, avec Grace Kelly (en français, Le crime était presque parfait). Ça n’avait pas marché, le film n’est passé que rarement en France (au Studio Christine, au moins deux années différentes), bien que le port des lunettes en carton était alors moins pénible. On a fait d’autres tentatives ultérieurement, et il y eut un film chinois, Dynasty (si-si ! C’était bien ce titre), une histoire de combats de sabres tournée en 1977 sous le titre Qian dao wan li zhu, première coproduction en relief de Hong-Kong et Taiwan. Là encore, un bide, et le procédé fut abandonné. Jusqu’à ce que de modernes margoulins le remettent à la mode. Par pur désintéressement, bien entendu.

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