Demorand, Tartuffe !
Avant-hier, dans ma notule intitulée Les phrases incompréhensibles, je faisais remarquer que beaucoup de personnes qui font profession d’écrire (c’est-à-dire, qui se font PAYER pour écrire) donnent souvent au public des documents mal torchés, qu’on peine à comprendre. Et je citais un roman dont je ne révélais pas le titre, car c’était sans intérêt, hors-sujet. Eh bien, aujourd’hui, c’est Nicolas Demorand himself, patron du journal « Libération » (et peut-être futur directeur de France Inter, voire PDG de Radio France, si Hollande, comme tous les présidents, oublie sa promesse de ne pas se mêler des nominations dans l’audiovisuel), qui vient à mon secours en me fournissant une nouvelle et magnifique occasion de m’offrir la tête de ces grands professionnels.
Vous n’ignorez pas que ce journal publie aujourd’hui les conversations entre Mohammed Merah et ce policier prénommé Hassan, membre de la DCRI, et qui a conversé avec lui au téléphone pendant quatre heures. Il y a huit jours, Télé-Poubelle avait fait scandale en en diffusant des extraits accompagnés de quelques images, mais « Libération » se vante de publier « l’intégralité des conversations, » écrit Demorand dans son éditorial en page 2.
L’intégralité ? Chouette alors, on va pouvoir être renseigné à fond ! Ouais… Mais, deux lignes plus loin, le cher Nicolas précise que ce document est « expurgé de ses passages les plus abjects ». Alors quoi ? Intégral, ou expurgé ? Que désigne l’expression « Ce document » expurgé ? Celui sur papier, ou celui sur papier ET celui sur Internet ?
Il est vrai que « Libé », ici, joue les tartuffes et donne dans le commercial « le plus abject », comme dit son boss, au point que Sartre, le premier directeur de ce canard, lui aurait fait bouffer sa pipe (celle de Sartre, pas celle de Demorand). En effet, la version sur papier du journal ne publie que des « extraits » (c’est mentionné dans le titre en page 3), et, pour avoir la totalité, il faut aller sur le site Internet, qui est payant ! Vous voulez lire des horreurs ? Très bien. Dans ce cas, payez !
Et donc, l’ambigüité dont je parlais est là : l’éditorial de Demorand laisse les choses dans le vague. Mais lui l’a sans doute fait exprès.
Tiens, je suis bon prince, je recopie in extenso le début du papier demorandesque : « Près de 200 pages, “Libération” publie sur son site Internet l’intégralité des conversations entre Mohamed Merah [NB : je signale que “Mohammed” s’écrit avec deux M, en arabe] et Hassan, l’agent de la DCRI qui le suivait de loin en loin à Toulouse. Ce document, expurgé de ses passages les plus abjects, ne vise pas à, etc. ».
Voilà, comme dirait Marie Colmant. Vous êtes fixés.