Écrire et parler simplement
J’aime qu’on me parle simplement. Pas comme à un bébé, car je déteste qu’on me parle de mon papa et de ma maman, comme si j’étais sur le canapé de Michel Drucker – du reste, jamais je ne m’assieds sur un canapé, c’est trop mou, je préfère m’asseoir par terre, mes amis vous le confirmeront.
Donc, je veux qu’on me parle normalement. Même chose quand on écrit. Par exemple, Albert Einstein et Albert Jacquard écrivaient simplement – sans doute parce qu’ils se prénommaient Albert –, et leurs livres sont beaucoup plus accessibles qu’un article de BHL dans « Le Point ». Pourtant, Bernard Henri-Lévy sait s’exprimer simplement, quand il tente de casser la gueule à Noël Godin qui vient de l’entarter.
Le pire, c’est probablement le langage technocratique, qui tente de dissimuler sous un jargon volontairement incompréhensible le mépris qu’on a pour les gens auxquels on s’adresse. Tenez, quand Jean-Luc Hees, alors directeur des programmes de France Inter, a viré Martin Winckler, écrivain et médecin, qui faisait une chronique très écoutée à huit heures moins cinq, et qui donnait des boutons aux pharmaciens en dénonçant quelques-unes des petites astuces favorables à leur bizness, il a justifié ainsi sa décision : « France Inter doit être une radio de l’offre, et pas de la demande ». Admirable d’hypocrisie. Traduction : les chroniqueurs de France Inter ne doivent pas écrire leurs papiers sur la demande des auditeurs, ce que Winckler avait fait une ou deux fois sur des sujets qui lui étaient réclamés, mais leur offrir au contraire un texte dont ils ont seuls l’initiative.
Avec cette arme, votre victoire est assurée partout, car ce travers n’est dénoncé nulle part.