Envoi vers le futur
Indéniablement, c’est l’été. Vous me direz qu’on ne s’en aperçoit pas en consultant thermomètres et baromètres, mais le réchauffement climatique a été si intense que tous ces instruments ont fondu. Je ne vois pas d’autre explication.
Néanmoins, il y a un signe infaillible, les programmes de radio-télé. L’invasion des remplaçants qui débutent et les rediffusions incessantes ne trompent pas. C’est simple, à France Inter, tout le monde est parti, on a dû faire appel à des illettrés pour lire les bulletins d’information, et ne me dites pas que vous ne vous en êtes pas aperçus.
À la télé, c’est plus raffiné. L’été étant la saison des marronniers (si vous ignorez ce qu’est un marronnier, en information, je ne peux rien pour vous), on fabrique les journaux avec n’importe quoi. Ainsi, ce soir, cette nouvelle : les gens s’envoient des messages électroniques à eux-mêmes, à ouvrir dans quelques semaines, et passent par un site spécialisé au cas où ils oublieraient. Diable ! Quelle audace et quelle imagination.
À ces enfonceurs de porte ouverte, je signale que j’ai fait ça quand j’avais dix-neuf ans. Mais moi, je ne visais pas une distribution de ma lettre (oui, c’était une lettre, on est passéiste ou pas) pour quelques semaines seulement après l’avoir écrite : j’avais prévu de la recevoir le jour de mon quarantième anniversaire…
Finalement, cette missive de quinze ou vingt pages, je ne l’ai pas envoyée, après avoir réfléchi au point suivant : théoriquement, la Poste aurait dû la délivrer vingt-et-un ans plus tard. Or, d’une part, elle se débrouille déjà très bien pour provoquer des retards de dix jours dans l’envoi d’une lettre urgente (et affranchie au tarif maximal) entre Paris et Lille. D’autre part, au bout de dix-sept années, les prix de ses services auraient tellement augmenté que je ne pourrais plus faire face à la taxe qui attendrait le destinataire, à savoir moi-même.
Une belle idée avortée.
Ma lettre, j’en ai fait des confettis.