Faites revenir Abdou Diouf !
On vient d’élire, à Dakar et pour quatre ans, celle qui succède au Sénégalais Abdou Diouf, dont j’ai parlé il y a quelques jours, et qui présidera donc l’OIF (Organisation Internationale de la Francophonie). Elle s’appelle Michaelle Jean, a 57 ans, est canadienne où elle a été gouverneur général, mais née à Haïti. Bien. Mais j’ai le regret de dire qu’elle vient d’inaugurer sa présidence en commettant une belle faute de français dans sa première déclaration, en annonçant qu’elle a l’intention d’être « plus près des citoyennnes et des citoyens ». Cette énorme imbécillité, dénoncée dès le 16 novembre 1982 par Pierre Desproges, n’est donc pas réservée aux politiques de France, puisque cette dame semble ignorer elle aussi une particularité spéciale de la langue française, que pourtant tous les enfants apprennent dès l’école maternelle !
Il s’agit de la féminisation des noms, sur quoi l’Académie française, qui n’est pas composée de barbons uniquement préoccupés de blablater sur le dictionnaire chaque jeudi, a donné son avis le 21 mars 2002, dans une déclaration sur le contresens linguistique servant de base à la féminisation systématique sévissant depuis quelques années. En fait, cela a démarré le 11 mars 1986, quand Laurent Fabius, Premier ministre, a conseillé qu’on applique les règles de féminisation recommandées par une commission instituée en 1984 par le gouvernement. Or, dès 1984, l’Académie avait publié une autre déclaration, préparée par Georges Duménil et Claude Lévi-Strauss, pas tout à fait des crétins par conséquent, qui faisait part de ses réserves et mettait en garde contre une féminisation autoritaire et abusive.
Donc, les académiciens faisaient observer que la langue française ne connaît que le masculin et le féminin, mais qu’il serait plus opportun de les appeler aussi, histoire de préciser leurs limites, genre marqué et genre non marqué. Je parie ma chemise que vous ne connaissiez pas ces expressions, donc on vous explique.
Le genre non marqué, qui coïncide avec le masculin, peut représenter aussi bien les éléments masculins que les éléments féminins, alors que le genre marqué fait une sélection. Ce n’est pas encore assez clair ? Vous allez tout comprendre avec un exemple. Si je vous parle d’un groupe de candidats au bac, ce groupe pourra contenir des garçons ET des filles ; tandis que si je parle d’un groupe de candidates, immédiatement l’on comprend qu’il ne contient QUE des filles.
Par conséquent, lorsque Michaelle Jean parle de citoyennes et de citoyens, elle ignore cette particularité spécifiant que le terme citoyen désigne les hommes ET les femmes du pays. Préciser davantage, c’est lourd, inutile, redondant.
Cela ne signifie pas que toute féminisation est saugrenue : beaucoup de noms de métier ont déjà été féminisés : institutrice, chercheuse, laborantine, infirmière. Rien n’interdit de les utiliser, d’autant moins que l’usage les a officialisés, en quelque sorte.
Faites revenir Abdou Diouf !