Faites sortir l’accusé
Gonflée, la télé de service public, d’avoir mis hier soir au programme son émission Faites entrer l’accusé, consacrée absurdement à l’affaire Viguier. Rappelons que Jacques Viguier, mari de la disparue, ne peut en aucun cas être considéré comme un « accusé », puisque deux procès l’ont innocenté totalement !
Résumons : en février 2000, Suzanne Viguier disparaît, et son amant accuse le mari de l’avoir assassinée. Pas de corps, pas de mobile, mais ledit mari devra subir deux procès, qui se concluent chacun par un acquittement ! Belle illustration de la justice française. En Angleterre, pas de corps, pas d’inculpation. Mais chez nous, l’affaire Seznec n’a pas servi de leçon.
Je ne veux pas faire de romanesque, mais le refus des Britanniques de poursuivre un présumé assassin en l’absence de toute preuve qu’un meurtre a eu lieu, c’est la sagesse même. Dans le cas contraire, par exemple aux États-Unis ou chez nous, cette carence du Droit, c’est la porte ouverte à bien des abus.
Ce trait a d’ailleurs été exploité dans un roman policier de Bill Ballinger, plutôt bien écrit, et paru en janvier 1956, Une dent contre lui (en anglais, The tooth and the nail, c’est-à-dire « La dent et l’ongle »), dont il reste trois exemplaires chez Amazon, si la curiosité vous dévore. C’est l’histoire d’un prestidigitateur qui veut se venger d’un type ayant fait son malheur, et pour cela, il s’arrange pour simuler son propre assassinat dans la maison du type en question, en laissant sur place – et de sa « mort » – un tas d’indices tout à fait probants. Si bien que le type se retrouve en prison, condamné à perpète sans savoir ce qui lui est arrivé.
Je ne dis pas que Suzanne Viguier a pu jouer à ce petit jeu, mais c’est amusant d’imaginer qu’elle aurait pu le faire pour jouer un sale tour à son mari. À ce détail près que cette fois, cela n’a pas marché. Eh oui, la réalité ne se décide pas toujours à dépasser la fiction...