Fusibles - 1

Publié le par Yves-André Samère

L’une des conséquences les plus ridicules (et j’ajouterais bien « déshonorantes » si ce mot disait quelque chose à quelqu’un) de la lubie gaullienne d’instaurer l’élection du président de la République au suffrage universel – ce qui n’avait JAMAIS été le cas en France –, l’une de ces conséquences, donc, fut de transformer la république en une monarchie n’osant pas dire son nom. Et s’il reste tant de monarchistes dans ce pays, ce n’est pas sans raison : on peut toujours préférer l’original aux copies. Avouez que, pour conserver un esprit républicain dans un pays pareil, comme c’est mon cas, il faut l’avoir chevillé au corps.

Et c’est ainsi que, entre autres, le Premier ministre, qui portait sous les précédentes républiques le titre de « président du Conseil » (sous-entendu, du Conseil des ministres), a été réduit peu à peu, et tout à fait ouvertement sinon officiellement, au rôle de fusible du chef de l’État. De quoi être fier ! Et dire que certains acceptent ce poste relevant du bricolage...

Très vite, et, sans surprise, cela commença avec De Gaulle qui avait inventé le système. Lui-même, avant de remplacer à l’Élysée le président Coty (et, le jour de la passation des pouvoirs, de l’abandonner purement et simplement sur le trottoir avec un très narquois et très discourtois « Au revoir monsieur Coty ! »), avait été son président du Conseil, entre le 1er juin 1958 et le 8 janvier 1959. Devenu président en titre, il eut trois Premiers ministres. Le premier des trois dans l’ordre chronologique, Michel Debré, qui avait rédigé pour lui la Constitution nouvelle, « sauta » au lendemain de la signature des Accords d’Évian qui mettaient fin, théoriquement, à la guerre en Algérie, car il n’était plus considéré comme utile. De Gaulle le remplaça par Georges Pompidou, fondé de pouvoir à la Banque Rothschild, lequel resta jusqu’en juin 1968, où il fut limogé pour le crime d’avoir gagné les élections législatives et gardé la tête froide face à la révolte étudiante et à la grève générale, alors que De Gaulle, affolé, se carapatait à Baden-Baden pour appeler au secours le général Massu... qu’il avait limogé en 1960. Le peuple français commençait à faire des comparaisons défavorables, et la vanité de l’Étoilé n’y tint plus, il renvoya Pompidou et le remplaça par un bon domestique, Maurice Couve de Murville, longtemps ministre des Affaires Étrangères et donc habitué à gober des couleuvres (il avait avalé celle de l’affaire Ben Barka en 1965, celle qui avait entraîné la rupture des relations diplomatiques avec le Maroc, quand le grand Général avait qualifié le roi Hassan II de « petit trou du cul » – authentique). Couve resta en poste jusqu’à la démission de De Gaulle, effective au soir d’un référendum perdu – encore une vexation –, le soir du dimanche 27 avril 1969. Cette fois, ce n’était pas le fusible qui sautait, mais toute la baraque.

Bien, suffit pour aujourd’hui, je vous raconterai l’histoire des autres fusibles un jour prochain. Pas demain, je passe la journée en prières.

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