Gamineries

Publié le par Yves-André Samère

Notre société prend des allures de Tour de Babel, en ceci que les mots ont de moins en moins de sens, ou qu’ils passent d’un sens à un autre avec autant de facilité que Manuel Valls passe du socialisme à la droite libérale.

Deux cas sont intéressants : soit le mot prend un sens atténué ; soit son sens se durcit.

Le mot prend un sens atténué quand il dit plus qu’on veut laisser entendre. Si vous vous plaignez d’être mort de fatigue ou d’ennui, on voit bien que vous n’êtes pas vraiment mort. Et si, dans une querelle, vous hurlez « Mais je vais le tuer, ce sale type ! », vous n’avez l’intention de tuer personne (et le type n’est pas forcément sale).

Inversement, on utilise fréquemment un mot anodin pour désigner une notion plus forte. Ainsi, le mot copain était naguère, conformément à son étymologie (« qui partage son pain ») synonyme de camarade ; aujourd’hui, il remplace amant de plus en plus souvent. Le plus curieux est que ce mot, amant, a suivi un parcours inverse, puisqu’il désignait un simple amoureux au temps de Molière. Et si vous disiez que Clitandre était l’amant d’Angélique – c’est dans L’avare, je ne vous apprends rien –, chacun comprenait qu’il aimait celle-ci et désirait l’épouser, sans que les tourtereaux vivent pour autant dans le péché.

Ce matin, j’ai été agacé par un propos d’une journaleuse de France Inter, qui faisait allusion à ce jeune homme tué au cours d’une manifestation contre un certain barrage. Or elle l’a qualifié de « gamin de vingt-et-un ans ». C’est ridicule, mais on entend ça constamment, le mot gamin désignant ici de jeunes adultes – une manie d’adultes plus âgés, qui voient les jeunes de très haut. Or le dictionnaire Littré est particulièrement clair : un gamin est : 1. un « petit garçon qui aide les ouvriers dont l’art a quelque analogie avec celui du maçon, les poêliers, les fumistes, les briquetiers », et 2. un « petit garçon qui passe son temps à jouer et à polissonner dans les rues ». Aucune ambigüité dans tout cela, un gamin est un petit garçon, pas un jeune homme.

Vous vous rappelez comment PPD a perdu sa place de présentateur du Journal Télévisé sur Télé-Poubelle ? Au cours d’une interview, il avait comparé Sarkozy à « un petit garçon », ce qui avait suffisamment déplu à l’intéressé pour qu’il réclame et obtienne sa tête. Sarkozy devait être un admirateur pointilleux de la langue française, je ne vois aucune autre raison.

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