Henri, prénom maudit ?

Publié le par Yves-André Samère

Il ne fait pas bon, en France, d’être roi et de se prénommer Henri. Si j’avais un fils, là, demain, je me garderais bien de lui coller ce prénom d’ailleurs démodé, alors que Kévin ou Brandon font si bien sur une carte de visite.

Sur le premier Henri, roi de France, rien à dire ; il a beaucoup fait la guerre et s’est marié deux fois, ce qui est une double erreur (façon de prolonger la guerre, en somme), néanmoins il n’est pas défuncté de mort violente, et c’est un point positif. Mais les trois suivants  !...

Henri II est mort d’un accident : au cours d’un tournoi où l’on rompait des lances, c’est celle de son adversaire qui s’est rompue. Hélas, elle s’est rompue dans son œil. On dit que son agonie a duré dix jours. Ce tragique évènement est raconté dans La princesse de Clèves, fameux bouquin qui a eu la veine de bénéficier d’une pub inédite de la part de l’homme le plus cultivé de France, et que je n’ai pas besoin de nommer, car j’ai assez parlé de lui aujourd’hui. L’adversaire malchanceux du roi était Gabriel de Lorges, comte de Montgommery (oui, avec deux M), et, bien que pardonné par sa victime, il préféra s’enfuir immédiatement pour se réfugier en Angleterre.

Henri III, lui, a bel et bien été assassiné : alors qu’il était assis sur sa chaise percée (!), il fut poignardé au ventre par un moine de l’opposition, Jacques Clément. Une mort peu glorieuse, que son assassin paya immédiatement, tué à coups d’épée par l’entourage du roi. Il valait mieux pour lui, connaissant ce qui attendait les deux spadassins suivants, mais on écartela... son cadavre.

En mourant, Henri III avait désigné comme successeur son beau-frère, Henri de Navarre. Détail piquant, le futur Henri IV fut d’abord Henri III, mais de Navarre ! Hélas, ayant pris le numéro suivant dans la file d’attente, il finit comme son prédécesseur, quoique dans un lieu moins gênant, puisque ce fut dans son carrosse, rue de la Ferronnerie, à Paris. L’assassin, François Ravaillac, fut abominablement exécuté après moultes tortures dont je vous épargne d’autant plus volontiers le détail que j’ai déjà fait une description semblable à propos du troisième et dernier régicide, Robert François Damiens, lequel s’en était pris à Louis XV mais n’avait gratifié sa cible que d’un coup de canif qui l’égratigna à peine, circonstance atténuante qui ne lui valut pourtant aucun pardon, sinon du roi, au moins de la justice de l’époque.

Il exista d’autres tentatives d’assassinat sur les chefs d’État français, or il semblait acquis que, sous la République, les présidents gracient leurs auteurs ayant évidemment échoué. Mais ce ne fut pas le cas de De Gaulle, qui fit effectivement fusiller Bastien-Thiry – lequel n’avait tué personne –, à cause de l’attentat manqué du Petit-Clamart. C’est que De Gaulle, aussi rancunier que ces vieux éléphants auxquels il ressemblait (voir ses caricatures par Moisan), avait moins de mansuétude que Louis XV, semble-t-il.

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