Houellebecq gratuit
Michel Houellebecq a décroché le Prix Goncourt, et on est content pour cet écrivain au sens civique irréprochable (il a déclaré n’avoir aucun devoir envers son pays, et vit en Irlande pour ne pas payer d’impôts). Or son livre primé, La carte et le territoire, contient trois passages copiés dans trois articles de l’encyclopédie en ligne Wikipedia : sur Frédéric Nihous, sur la mouche domestique et sur Beauvais.
Ici, une petite précision technique. Les articles de Wikipedia sont publiés sous une licence Creative Commons By-Sa, laquelle autorise la reproduction des textes, à deux conditions : en citer la source, et partager soi-même la reproduction (ou l’œuvre qui les utilisent) sous la même licence. On en conclut, sans trop forcer la réalité, que le roman de Houellebecq doit être lui aussi sous la même licence, et être publié tout ausss gratuitement que les articles que Wikipedia. C’est la loi ! Horreur...
C’est ainsi qu’un petit malin, Florent Gallaire, qui fut candidat aux élections, en 2008, dans le treizième arrondissement de Paris, a décidé de publier le roman de Mimi, intégralement, sur Internet. Le texte est ici, et je l’ai téléchargé, mais dépêchez-vous, il risque de ne pas y rester très longtemps.
Vous imaginez comme l’éditeur, Flammarion, a été ravi de cette initiative. Et il a « entrepris des démarches juridiques », comme on écrit dans des journaux mieux écrits que le présent bloc-notes, lequel n’est qu’un torchon que vous devriez avoir honte de lire. Or, cette réaction est assez irréfléchie. En effet, en portant plainte, Flammarion apporte de l’eau au moulin... de ceux qui pensent qu’on devrait appliquer la notion de droit d’auteur avec un peu moins de rigueur, pour dire les choses aimablement. Suivez le raisonnement : puisque Houellebecq a le droit de « s’inspirer » de textes écrits par d’autres, c’est que n’importe qui possède aussi ce droit. Sinon, le Prix Goncourt est une contrefaçon, ni plus ni moins.
Voilà qui serait assez farce.