Jeanne « d’Arc » ne s’appelait pas ainsi !

Publié le par Yves-André Samère

Henri Guillemin (1903-1992) est un de nos meilleurs historiens. Classé à gauche, chercheur infatigable et réputé pour son honnêteté non moins que son franc-parler, il a rétabli la vérité sur un certain nombre de personnages historiques et prouvé que beaucoup de légendes sur eux étaient fausses – ce qui ne peut que me plaire !

L’une de ses recherches et entreprises de démystifications portait sur Jeanne d’Arc. Et, justement, il contestait la réalité de ce nom, il a d’ailleurs écrit un livre sur elle qui s’intitule Jeanne, dite “Jeanne d’Arc”. Son argumentation et les preuves qu’il en apporte ne peuvent pas être résumées ici, mais je vous invite à écouter ce très court passage au tout début d’un de ses cours à la Radio Télévision Suisse : cela dure à peine quelques secondes, et c’est révélateur. En un mot, à l’époque où Jeanne vivait, le petit peuple était indifférent aux noms de famille, il n’en portait pas, on ne connaissait que le prénom et parfois le surnom (au fait, en anglais, le « nom de famille » se dit bien surname). D’ailleurs, même chez les rois, cela valait aussi : le fondateur de la dynastie des Capétiens, en 987, est Hugues Capet, qui devait son surnom à la cape de saint Martin, car il était abbé (quoique laïc) de la collégiale Saint-Martin, à Tours.

Je précise, et Guillemin n’en parle pas, que cette situation a perduré très longtemps dans les pays arabes. Jusque vers 1970, si vous prénommiez Hassan et que votre père avait Ahmed pour prénom, on vous appelait Hassan ben Ahmed (Hassan, fils d’Ahmed), sans plus. Ajoutons que c’est toujours, sous une forme un peu différente, le cas en Islande : pas vraiment de nom de famille. Si vous êtes un garçon, on ajoute le suffixe son au prénom de votre père ou parfois de votre mère ; si vous êtes une fille, on y ajoute dóttir, et vous voilà pourvu d’un pseudo-nom de famille... qui diffère de celui de vos parents ! L’état-civil islandais s’y retrouve néanmoins, car les Islandais sont moins de 350 000. Aux États-Unis, ça ne marcherait pas.

Écrire ci-dessous une ânerie quelconque :