Le mot juste

Publié le par Yves-André Samère

Lorsqu’on écrit tous les jours, je crois que la priorité doit être de n’utiliser que le mot juste. Ensuite viennent le respect de la grammaire, de la syntaxe, de l’orthographe, de la structure des phrases, qui sont plutôt des préoccupations techniques, parce que, en évitant les fautes, vous facilitez la tâche de votre lecteur, lequel n’a pas à se demander sans cesse ce que vous avez voulu dire. Après cela, mais je crois que peu de scripteurs s’en préoccupent, il faut faire attention à la sonorité de vos phrases – disons : la musique, pour faire un peu cuistre –, et supprimer les hiatus et les cacophonies (exemple : si vous écrivez « Je ne me sens bien qu’à Casablanca », c’est une cacophonie), et ce n’est pas pour rien que Flaubert relisait à haute voix ses propres textes.

Le mot juste, il semble que beaucoup s’en fichent, et j’ai souvent été agacé par ces critiques de cinéma qui, parlant d’un film copiant fidèlement la réalité, disent que c’est du naturalisme. On a envie de leur faire cadeau d’un dictionnaire (justement, j’ai l’adresse de Michel Ciment, de Danielle Heymann et de Jean-Marc Lalanne). Le naturalisme, la racine de ce mot le dit suffisamment, c’est l’étude des productions de la nature (et j’ai cité le mot naturalistes dans la précédente notule qui parlait de Darwin) ; accessoirement, l’occupation consistant à empailler des animaux, comme Norman Bates dans Psychose ; et aussi, le fait de ne reconnaître que la puissance de la nature en niant l’existence de Dieu, autre sens un peu à part des questions de cinéma.

Par conséquent, un film qui reste fidèle à la réalité devrait être qualifié de réaliste, pas de naturaliste. Mais les critiques que je vise se sont tous donné le mot, et il n’y en a pas un qui parle un français correct. Normal, dans ce métier, chacun copie ce que dit ou écrit le voisin. Dans le même ordre d’idées, tous croient que les décors de cinéma sont faits de carton-pâte, ce qui est faux.

Écrire ci-dessous une ânerie quelconque :