Le piano de « Casablanca »

Publié le par Yves-André Samère

Frédéric Pommier n’est pas le chroniqueur le plus ignare de France Inter, et j’ai lu un ou deux de ses livres. Mais à vouloir faire le malin, il arrive que les meilleurs se plantent...

Ce matin, Pommier faisait un petit papier sur la vente aux enchères, qui aura lieu aujourd’hui à New York, du piano ayant servi dans une scène mémorable de Casablanca, le célèbre film de Michael Curtiz. C’est un beau film d’amour sur fond de guerre, qui se déroule principalement dans un café appartenant à un certain Rick, à Casablanca. On voit dans cette scène Ingrid Bergman prier le pianiste de la maison de jouer pour elle une chanson qui évoquait un vieux souvenir, et le pianiste chantait la chanson As time goes by en s’accompagnant au piano (l’interprète Dooley Wilson chantait vraiment, mais il était doublé pour le piano, et on ne voyait pas, dans cette scène particulière, ses mains sur le clavier – on les voyait dans une autre scène).

Donc, ce matin, Frédéric Pommier décrit succinctement la scène, et ajoute que le prix de vente escompté pour le piano sera de 1,2 million de dollars, soit, ajoute-t-il finement, 14 000 dollars par touche. La gaffe du chroniqueur trop zélé !

Le calcul serait exact si le piano comptait 85 touches, comme les pianos modernes. Or il n’en compte que... 58 ! Ce qui met le prix de la touche à environ 20 000 dollars. Tout augmente, on vous dit. Ce piano, même si cela ne se voit pas à l’écran puisque le film est en noir et blanc, était rose, tel qu’on le voit ICI, et je ne crois pas qu’il fasse le bonheur d’un pianiste virtuose, avec moins de cinq octaves. Depuis, un sagouin a repeint l’instrument en vert, a changé le panneau supérieur, toutes les décorations ont disparu, le bois est couvert d’éraflures, et la pédale de droite est amochée (cliquez sur l’image pour l’agrandir fortement).

Cette connaissance ne me vient pas de Wikipedia, qui n’a jamais traité ce sujet. En fait, cet instrument, je l’ai vu de mes propres yeux, et je l’ai même touché (je n’en ai pas joué) lors d’une exposition des objets mythiques de la Warner, au Centre Pompidou, il y a quelques années. On y voyait aussi, entre autres, le costume et le fusil de John Wayne dans ses westerns, le carnet d’adresses de Jack Warner, un projet de décor pour La corde (d’Alfred Hitchcock), une robe blanche de Marilyn Monroe, une lettre manuscrite de Bette Davis engueulant sur trois pages le patron de la Warner qui lui avait interdit de jouer dans des pubs pour la cigarette (!), et la véritable statuette du film Le Faucon maltais, bien protégée dans une vitrine.

J’ai vu au même endroit d’autres expositions avec d’autres objets mythiques, mais ce serait hors sujet, or vous connaissez mon horreur de la digression. J’en parlerai donc une autre fois...

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