Le travail (de) nuit

Publié le par Yves-André Samère

Les magasins Sephora n’ont rien à voir avec la femme de Moïse, qui se nommait ainsi (sublime Yvonne de Carlo dans Les dix commandements, elle méritait bien son surnom de « plus belle femme du monde »), ce sont plutôt des endroits où l’on vend des parfums et autres « brimborions inutiles », comme disait Flaubert. Il en existe plusieurs à Paris, notamment au Forum des Halles (naguère, au même endroit, il y avait un cinéma !), mais le plus connu est celui des Champs-Élysées. Or ce dernier jouissait d’un privilège, attaché au fait que cette avenue est très fréquentée, surtout le soir et durant le week-end : il pouvait donc rester ouvert jusqu’à minuit ou une heure du matin les vendredis et samedis.

Mais un syndicat s’est mêlé de ce qui ne le regardait pas, et a exigé que la loi soit appliquée, obligeant à fermer à l’heure où les poules vont se coucher. Pourtant, des poules, sur les Champs-Élysées, ça ne manque pas, et si elle vont se coucher de bonne heure, elles se relèvent très vite afin de retourner au turbin. C’était mon quart d’heure annuel de vulgarité beaufisante.

Néanmoins, vous allez me dire que c’est le rôle d’un syndicat, de défendre les gentils travailleurs contre les méchants patrons esclavagistes qui les exploitent en les obligeant à travailler (pardon de ne pas écrire bosser comme l’aurait fait n’importe qui d’autre), et cela, y compris la nuit. Ben non, dans le cas présent, non seulement les employés de Sephora ne se contentaient pas d’accepter de travailler la nuit, mais ils le réclamaient – et ont même fait une pétition en ce sens –, puisqu’ils étaient alors beaucoup mieux payés durant ces heures ! Et ça, l’association objective entre patronat profiteur et prolétariat persécuté, les syndicats ne le supportent pas, ils ont l’impression d’être trahis et de ne servir à rien. Aussi, quitte à mécontenter lesdits persécutés, ils ont fait pression sur le gouvernement et ses sacro-saints tribunaux pour... casser les pieds de tout le monde, touristes étrangers compris, lesquels étaient pourtant bien contents de pouvoir faire leurs emplettes après le coucher du Soleil.

Le plus pittoresque de cette histoire, c’est que le syndicat qui a semé la pagaille n’a... aucun adhérent parmi les employés du magasin, lesquels ne se sont pas privés de le huer. C’est bien pourquoi j’écrivais en commençant qu’il se mêlait de ce qui ne le regardait pas.

Tout ce qui précède reste valable à propos de ces magasins de bricolage auxquels on a interdit d’ouvrir le dimanche : les clients étaient très satisfaits de pouvoir y faire leurs courses le jour où ils ne vont pas au travail ; les employés, d’être payés beaucoup plus ; et la direction, de faire ce jour-là de gros bénéfices. Il urgeait donc de mécontenter tout ce monde.

Mais en France, on n’a pas encore tout à fait compris que, lorsqu’une loi est idiote, il est urgent de la modifier, voire de la supprimer. Hollande, qui a fait retailler la loi sur le mariage, autrefois interdit aux homosexuels, devrait bien peser aussi sur cette survivance du passé, dont l’origine là encore est uniquement religieuse : en l’occurrence, le dimanche, c’est le jour du Seigneur, n’est-ce pas ? Et comme « Dieu » s’est reposé le septième jour, nous nous devons de l’imiter. Il y va de notre Salut éternel.

Écrire ci-dessous une ânerie quelconque :

A
bonjour<br /> Il est facile de prôner le travail de nuit et du dimanche, quand on ne l'a jamais , ou exceptionnellement, à ma connaissance, pratiqué. Je me permettrais de souligner que les salariés du magasin<br /> des champs Elysée, ont à l'évidence une moyenne d'age beaucoup plus faible que l'ensemble des travailleurs. Ils ont donc moins de contraintes de fatigue dù aux horaire décalés.<br /> je ne considère pas, même si il s'agit d'une conséquence historique le dimanche comme un jour religieux, mais une journée de repos commune à un maximum de personnes.<br /> Il est illusoire de penser que cette ouverture est pour but de rester une exception, mais plutôt d'amorcer un plus vaste mouvement. Dans ce cas, les syndicats tant honnis, sont tout à fait légitime<br /> de lutter pour la protection d'un acquis commun.<br /> Il est d'ailleurs très instructif, de voir, que dans leur immense majorité, les défenseurs du travail du dimanche, sont ceux qui ne le pratique pas.<br /> Il peut paraitre légitime pour certains que le confort d'une élite, se fasse au détriment du gueux. Ce dernier remerciant le premier de sa bonté de penser à l'amélioration de sont sort.<br /> J'ais une certaine habitude, que défendre mes droits acquis par les anciens dans le sang et la douleur, dérange. Je ne me sens aucunement persécutés, mais faisant partie du prolétariat, je ne me<br /> fait aucune illusion sur la volonté, non seulement du patronat, mais surtout d'une classe s'estimant supérieure, de me remettre à leur service.<br /> Travaillant depuis un quart de siècle en 3:8, j'ais déjà fait cadeau, statistiquement d'une décennie d'espérance de vie. Je vous serais grés de comprendre, que je voudrais l'éviter à mes<br /> enfants.<br /> Je pense que la votre ne sera pas trop impacté par le désagrément de consacrer le dimanche et la nuit, à du repos, une vie familiale, voir un recueillement religieux ou philosophique<br /> En vous remerciant, de l'attention que vous avez pu consacrer à mes propos.<br /> Respectueusement<br /> Alain Lesage
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