Logez-vous pour pas cher !

Publié le par Yves-André Samère

Vous cherchez à Paris un logement pas cher ? C’est facile, à condition d’être un homme politique. De droite ou de gauche, peu importe, l’inégalité devant la loi est la même pour tous.

Il y a quelques années, « Le Canard enchaîné », par la voie de son supplément trimestriel « Les dossiers du Canard », avait déjà lancé une enquête, qui s’était avérée gratinée. C’était sous le mandat de Chirac à l’Hôtel de Ville, mais on pouvait espérer que, sous Delanoë, la situation changerait au moins un peu. Mais non, et Jean-Yves Mano, adjoint socialiste au maire de Paris, chargé du logement mais qui ne doit pas avoir beaucoup de pouvoir si l’on en croit son récent gémissement public, a jugé que la situation actuelle était « éthiquement intenable », ce qui un parfait euphémisme. En effet, alors que la Ville reçoit chaque année 120 000 demandes de logement en HLM, elle ne peut en satisfaire que le dixième. Et la Chambre régionale des comptes attribue cela au « taux de rotation structurellement faible », en clair, peu de déménagements chez les occupants, parce que même les plus aisés estiment que « le coût des logements sur le marché privé [les] “incite” [sic, tu parles !] à ne pas quitter leur logement social ».

Or, parmi ces locataires aisés, on avait déniché en 2008 Jean-Paul Bolufer, alors directeur de cabinet… du ministre du logement de l’époque, Christine Boutin : 190 mètres carrés boulevard du Port-Royal, pour un loyer de 1197 euros (dans le privé, il aurait payé entre 3800 euros et 5700 euros). Cette affaire a du reste flanqué la trouille à Benoist Apparu, secrétaire d’État chargé du logement, qui occupait un logement social quand il était député de la Marne : il s’est empressé de rendre les clés ! Mais la mairie de Paris a eu beau lancer une opération visant à faire libérer ces appartements, beaucoup se sont cramponnés à leurs murs.

Ainsi, Jean-Pierre Chevènement occupe toujours un logement de la Ville, dans le très recherché 5e arrondissement, soit 120 mètres carrés pour 1271 euros par mois (comme sénateur, il touche 7000 euros par mois). Dans le privé, il paierait plutôt 3000 euros. Delphine Batho, députée des Deux-Sèvres et proche de Ségolène Royal, bénéficie également d’un logement social à Paris, 108 mètres carrés dans le 19e, pour lequel elle ne paye que 1524 euros, soit 20 % au-dessous des prix du marché.

Le hic, c’est que, si vous avez décroché un HLM et qu’ensuite vos revenus ont fortement augmenté, ce n’est pas un cas d’expulsion prévu par la loi ! Un exemple de plus que la morale et la légalité ne font pas bon ménage. Ainsi, l’UMP Jean-Jacques Gianesinni, élu au conseil de Paris du 19e et locataire d’un appartement Porte de Pantin, explique qu’il a « obtenu cet appartement dans les années 1990 alors [qu’il était] chômeur »… mais il est aujourd’hui collaborateur de Chantal Jouanno, ministre des sports). On espère qu’il ne chôme plus.

Et Fadela Amara, me demanderez-vous ? On se souvient de ces DEUX appartements qu’elle occupait lorsqu’elle était secrétaire d’État (50 mètres carrés dans le 13e pour 520 euros et 120 mètres carrés dans le 7e pour 0 euro, puisque c’était son appartement de fonction). N’étant plus ministre, mais Inspectrice générale des affaires sociales, a-t-elle rendu ses deux appartements ? Pas tout à fait ! Le second, oui, puisqu’il était attaché à son secrétariat d’État… mais elle a gardé le premier !

Moins connue, Michèle Bluemental, retraitée de l’Éducation nationale et maire socialiste du 12e arrondissement depuis 2001, occupe toujours, avec son mari, un appartement de 70 mètres carrés non loin de sa mairie, tandis que son adjoint Alexis Corbière, élu front de gauche, est également locataire d’un appartement de la Régie municipale.

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