Marseille propre : rêvons...
Il existe à Marseille une coutume assez curieuse, dont je ne sache pas qu’elle soit pratiquée ailleurs, mais je suis peut-être mal renseigné. Il s’agit du « fini-parti », en vigueur chez les éboueurs de la communauté urbaine Marseille Provence Métropole (MPM). En clair, quel que soit le nombre d’heures de travail que vous devez à votre employeur – c’est sept heures quotidiennes, dans leur cas –, dès que vous considérez avoir terminé votre tâche, vous rentrez chez vous. C’est assez pittoresque. Imaginez le même sytème chez les policiers, les instituteurs, les infirmières, les militaires, voire les pilotes de ligne...
Le résultat, c’est qu’il suffit de fermer les yeux pour ne pas voir qu’il reste du travail, et certains s’en privent si peu que les Marseillais considèrent leur ville comme sale. À vrai dire, ils devraient venir faire un tour à Paris, pour se consoler : je leur garantis que certains quartiers de la capitale, comme le mien, ne valent guère mieux. Ici, ce n’est pas Singapour !
En tout cas, il y a un peu plus d’un an, un avocat marseillais a réagi, et a porté plainte contre la ville, devant le tribunal administratif. Il s’agissait de Benoît Candon, qui a fait valoir qu’un rapport de la chambre régionale des comptes datant de 2007 pointait « une durée moyenne équivalant à la moitié du temps de travail “légal”, soit trois heures et demie environ », si bien que le contribuable marseillais payait quatre heures pour rien, avec ce que vous imaginez sur les finances de la ville.
Que répondre à ce constat ? La communauté urbaine a trouvé l’argument idéal pour ne rien changer, et son avocat, maître Jorge Mendes Constante, a fait valoir que « le fini-parti, c’est une question d’histoire, d’héritage, d’usage, de tolérance ». Il a en outre été appuyé par l’avocat de Force ouvrière, qui est le syndicat majoritaire chez les éboueurs. L’héritage, l’usage. La coutume, quoi... On adore ce type d’argument, utilisé aussi dans les pays où les filles sont mariées contre leur gré, voire excisées.
(Je fais exprès de comparer des pratiques n’ayant rien à voir entre elles, vous connaissez ma mauvaise foi)
Candon a été soutenu par Marseille Propre, collectif présidé par Marie Coustenoble, et créé à l’initiative de Marseillais excédés par la saleté de la ville, lesquels affirment que rien ne pourra se faire à Marseille tant que ce problème ne sera pas réglé, et qu’il est donc inutile d’investir des millions dans la communication et la promotion d’événements comme Marseille 2013 - Capitale de la Culture ! Après tout, puisque le maire Jean-Claude Gaudin a fait voter en 2002 une délibération qui fixait la durée annuelle du temps de travail à 1560 heures pour tous les agents de MPM, donc sept heures par jour, le fini-parti est bel et bien illégal, a fait valoir Candon, après avoir été débouté en janvier 2011... pour une question de forme. Il a fait appel. Jugement prévu cette année.
En attendant, je propose d’instaurer le fini-parti au gouvernement.