Polar
Si vous écoutez la radio ou regardez la télévision (je vous déconseille l’inverse, mais vous faites comme vous voulez), une fois par jour au moins arrive à vos oreilles meurtries le mot polar. Il est généralement appliqué à un film ou à un livre – le jour où il désignera une sculpture ou une musique, soyez assez bons pour me prévenir. Or, dans 99,99 % des cas, c’est à contresens.
Ce mot, polar, désigne normalement un roman policier de mauvaise qualité. Par extension, un film du même métal. On aurait pu dire il y a peu « un roman jetable », mais depuis que les appareils photo sont jetables, ça ne s’emploie plus. Naguère, c’était plutôt « un roman de quat’sous », mais les sous, plus personne ne sait ce que c’était (pour les nostalgiques, il fallait vingt sous pour faire un ancien franc, et la pièce de cinq sous était trouée – voir Les cinq sous de Lavarède).
Donc, un polar ne peut en aucun cas être un bon film policier, pas plus qu’un bon roman policier. Et il y a de quoi grincer des dents lorsque, à la radio ou à la télé, un intellectuel qui a fait la totalité de son cursus universitaire sur Skyrock s’avise de qualifier de « polar » une nouvelle extraite des aventures de Sherlock Holmes, ou un film d’Hitchcock. (Et jamais je n’ai inséré dans un même paragraphe autant de rimes en ock, ce qui est involontaire)
Rappelons à ceux qui n’étaient pas là que, de toute sa vie, le cher sir Alfred Hitchcock n’a tourné aucun film policier. Il a déclaré à François Truffaut qu’il trouvait ce genre de film « emmerdant ».