Portons tous plainte contre Facebook !
Je n’ai rien contre Facebook, ni contre les réseaux prétendus « sociaux », et j’observe à leur égard une attitude de coexistence pacifique, en me tenant à l’écart. Je ne confierais aucun renseignement personnel à Facebook, et serais bien en peine de le faire, puisque je n’y ai ouvert aucun compte – ce qui, au passage, m’interdit de consulter le compte des autres, et imaginez la souffrance que cela me cause. Je trouve débile ce genre d’activité, et ne suis pas tenté de mettre un doigt là-dedans. Inutile donc de me chercher sur Facebook dans l’espoir de connaître le numéro de mon compte en banque, la date de naissance de mes enfants passés ou futurs (qui me sert de mot de passe pour mon courrier, comme chez tout le monde), le nom de mon chien (c’est « Claude Guéant ») ou l’adresse des nombreuses maîtresses que j’entretiens à Neuilly, au Carlton de Lille et à l’étranger. Vous n’y trouverez pas non plus mon opinion sur le ministre dont je vais parler maintenant.
Donc, Fleur Pellerin fait ministre au sein de la petite entreprise (qui connaît la crise) de messieurs Ayrault et Hollande. Très précisément, elle est « ministre déléguée chargée des PME, de l’Innovation et de l’Économie numérique ». Pour simplifier, disons qu’elle met notamment le nez dans tout ce qui concerne Internet, avec cet inconvénient qu’elle doit partager ces attributions avec un autre ministre, celui de la Culture, Aurélie Filipetti. Situation absurde et riche de bisbilles à venir, si l’on en croit la saine entente et la franche camaraderie qui règne dans la maison.
Hier soir, madame Pellerin était l’invitée de Yann Barthès au petit Journal, sur Canal Plus. Il s’agissait, pour Yann le Diabolique, de lui arracher quelques confidences et autres opinions sur la non-affaire du jour : le fait – totalement bidon – que Facebook aurait laissé échapper (aujourd’hui, on dit « fuiter », c’est tellement plus élégant) des informations confidentielles sur ses visiteurs. Informations fournies par les visiteurs eux-mêmes, qui y écrivent n’importe quoi et y affichent n’importe quelle photo, en escomptant que les autres visiteurs auront la décence de ne pas lire ni regarder ce qui ne les concerne pas. C’est dire l’intelligence, l’esprit critique et la profonde connaissance de l’âme humaine qui animent les adorateurs de Facebook.
Or tout cela est faux, Facebook n’a rien laissé échapper, il a seulement simplifié le processus d’affichage des messages déposés par ces armées de pigeons ; de sorte que les fientes un peu anciennes qu’ils ont oubliées sont devenues plus facilement accessibles. Elles l’avaient toujours été, il fallait seulement quelques clics de souris supplémentaires.
Mais... Et Fleur, gémissez-vous ? Où est-elle, dans tout ça ? Très simple : elle a tout simplement affirmé dans le Petit Journal qu’il ne serait pas mauvais que les gogos qui se sont piégés eux-mêmes, et il n’y en aurait guère que vingt-sept millions, pourraient légitimement porter plainte contre Facebook – qui n’a strictement rien à se reprocher dans le cas présent ! Eh bien, en vérité en vérité je vous le dis, je souhaite vivement que lesdits la prennent tous au mot. On n’a pas si souvent l’occasion de rigoler.
Et puis, les tribunaux n’ont rien à faire, en ce moment.
(Ils choisissent bien leurs ministres, messieurs Ayrault et Hollande. Après la mère de Térébentine Duflot... Vivement l’embauchage de Ségolène, pour que la fête soit complète !)