Présidents polyglottes ?

Publié le par Yves-André Samère

On ne peut pas demander à un président de la République française, qui par définition est une personnalité aux connaissances universelles, d’être capable, en plus, de parler les langues étrangères. Remontons en sens inverse l’histoire des présidents de la Cinquième République.

Nicolas Sarkozy est réputé pour manier impeccablement la langue française, et l’imparfait du subjonctif n’a pas de secrets pour lui. On suppose également que sa dernière épouse lui a inculqué quelques notions d’italien, et que la précédente, qui était la petite-fille du grand compositeur Isaac Albéniz, lui inculqua deux ou trois mots d’espagnol. En outre, il manie si bien l’anglais que Sa Gracieuse Majesté la reine Elisabeth n’en est pas encore revenue, et que son magnifical, employé lors que sa visite à Londres, est en passe d’entrer dans les dictionnaires par décret royal.

Chirac parlait peu en public, il préférait l’action. Néanmoins une de ses visites en Israël prouva au monde entier qu’il maniait l’anglais comme pas un. Pour être juste, il maîtrisait mieux le russe, ce que peu de gens savent, et un éditeur lui proposa, lorsqu’il devint Premier ministre de Giscard en 1974, d’éditer la traduction qu’il avait faite d’un auteur classique russe (je ne sais plus s’il s’agissait de Pouchkine ou de Gogol), mais il refusa.

Mitterrand ne parlait aucune langue étrangère, ce qui m’épargne de trop longs développements.

Giscard, qui était né en Allemagne, avait certainement des rudiments d’allemand, mais on ne l’a jamais entendu parler cette langue en public. Il connaissait aussi l’anglais, mais n’étalait pas cette connaissance.

On ne sait rien des connaissances de Pompidou. Agrégé de lettres, il maîtrisait le français, mais fit un jour une énorme faute au cours d’une conférence de presse, parlant d’un « soi-disant chèque » reçu de la part d’une société coupable d’escroquerie – prétendirent de méchants journaux de gauche – pour financer sa campagne électorale. Des autres langues qu’il aurait connues, on ne sait rien.

De Gaulle avait appris l’allemand pendant ses études secondaires (son père tenait une école privée à Paris), et son séjour à Londres l’avait familiarisé avec l’anglais, mais il voulut faire mieux, et donna dans une charmante manie. Elle consistait, lorsqu’il se rendait dans un pays étranger en voyage officiel, à s’adresser au public en prononçant quelques phrases dans la langue du pays, qu’il avait apprises phonétiquement. Le paradoxe, c’est que, s’il se tira d’affaire en russe, en polonais, en roumain et même en turc, il se planta lamentablement avec la langue la plus facile au monde, l’espagnol ! En effet, en 1964, il s’était rendu au Mexique, et son premier discours à Mexico, lancé du balcon du Palacio Nacional le 16 mars devant un demi-million de Mexicains, se terminait ainsi : « Marchemos la mano en la mano ». Phrase restée célèbre, mais à laquelle les Mexicains, pas plus qu’au reste du discours, ne comprirent... rien ! De Gaulle n’avait pas assimilé l’importance de l’accent tonique, et l’avait placé sur la dernière syllabe du mot mano, comme on le ferait en français, alors qu’en espagnol, on le place régulièrement (sauf quelques exceptions) sur l’avant-dernière.

Même De Gaulle ne saurait tout connaître...

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