Sarkozy en spectacle sur France 3
C’était hier la fête de Sarkozy, sur France 3 : deux documentaires d’une heure et demie chacun lui ont taillé un costard à sa mesure.
Le premier, Nicolas Sarkozy, secrets d’une présidence (mais qu’est-ce qu’ils ont tous, chez France Télévisions, à voir des secrets partout ?), avait pour auteur Franz-Olivier Giesbert, qui n’apparaissait, muet, que dans des intermèdes en noir et blanc, et avait pour réalisateur Laurent Portes. C’était en fait, pour l’essentiel, une succession d’anciens ministres et proches collaborateurs de l’ancien président, dont la plupart (sauf peut-être Nadine Morano et Henri Guaino), ne se sont pas trop gênés pour dire tout le mal qu’ils pensaient d’un homme que naguère ils faisaient mine de révérer. On a tout particulièrement remarqué Rama Yade et Fadéla Amara (Rachida Dati, la troisième du trio natif d’Afrique, n’a pas été interrogée), ainsi que l’inévitable Roselyne Bachelot, qu’on voit et entend absolument partout en ce moment – encore ce matin sur France Inter, pour parler d’opéra, puisqu’elle va à l’opéra au moins « une fois par semaine ». Toutes les trois ont fait la psychanalyse du patient, et en ont fait du petit bois.
Mais le clou du spectacle était constitué par les joyeux duettistes Patrick Devedjian et surtout François Fillon, ancien Premier ministre et qui, bien que qualifié de « collaborateur » par son ancien patron, a tenu bon pendant cinq ans, on se demande pourquoi. Il n’a pas caché lui avoir offert sa démission trois fois dans la même journée, lorsque éclata entre eux un désaccord radical à propos du Front National : Sarkozy entendait ne pas combattre le FN sur le plan idéologique mais seulement lui piquer ses électeurs, alors que Fillon, plus classique, l’ostracisait pour des raisons morales. Il est pourtant resté, supportant l’extrême droitisation de la campagne électorale...
Le second documentaire, La droite a-t-elle tué Nicolas Sarkozy ?, dû à Jean-Charles Deniau, m’a davantage intéressé, car il plaidait pour une thèse originale mais pas bête : que la droite, dès l’avènement du grand chef en 2007, a souhaité qu’il se plante à l’élection suivante, et pour des tas de raisons. Chacun les connaît : sa vulgarité, son inculture crasse, ses manières de plouc, ses mauvaises fréquentations, le Fouquet’s, le yacht de Bolloré, sa vie privée cahotique mais offerte en pâture au public afin de servir sa publicité, sa manie de dire tout et son contraire, et par-dessus tout, la trahison originale, celle qui en a fait l’ennemi irréductible de Chirac lorsque Sarkozy a pris le parti de Balladur. Au passage, l’auteur du film dément que Chirac ait voulu plaisanter (« Humour corrézien », ont dit Bernadette et Claude Chirac) lorsque l’ancien président a proclamé publiquement « Moi je voterai Hollande ! » Il était bel et bien sérieux. Malheureusement, il n’est pas allé voter, a confié une procuration à sa femme, et l’on ne doute pas que celle-ci, tout acquise au « traître », a fait de son vote ce qu’elle a voulu.