Peine de mort

Publié le par Yves-André Samère

Je lis en ce moment, parmi une demi-douzaine de livres, un roman criminel de l’excellent auteur néo-zélandais Paul Cleave, intitulé La collection. Et j’y découvre le passage suivant :

 

La Nouvelle-Zélande doit-elle ou non réinstaurer la peine de mort ? Tout a commencé par une mauvaise blague du Premier ministre, une remarque désinvolte en réponse à la question des mesures que le gouvernement allait prendre pour tenter de contenir la hausse du taux de criminalité et de la population carcérale, mais l’affaire a rapidement acquis de l’ampleur quand des citoyens l’ont pris au mot et ont demandé ce qui empêchait le gouvernement de considérer sérieusement cette possibilité. Après tout, si la mort était assez bien pour les victimes, pourquoi ne pas en faire profiter leurs tueurs ?

 

Naturellement, cette réflexion est faite par un de ses personnages, ce n’est pas l’opinion de l’auteur ! Mais ai-je un avis personnel ? Demain, si Dieu me prête vie, je ferai un article sur un film que je viens de voir, The Eichmann show, réalisé en 2014 par la BBC et jamais sorti en France, dont le sujet tourne autour de la peine de mort appliquée aux nazis, et je prévois que cet article sera très difficile à rédiger. Néanmoins, je peux déjà dire que, même si le pire des criminels est passible de la peine capitale, cela pose deux problèmes – car vous savez que je trouve toujours DEUX raisons de faire ou de ne pas faire les choses.

Donc, si je ne suis pas partisan de la peine de mort, j’y suis opposé pour :

① une raison pratique : comment trouver un bourreau ? Vous accepteriez ce travail, vous ? À notre époque, c’est quasiment impossible.

② une raison morale : aucun État civilisé ne peut envisager de se mettre au niveau des criminels, et de tuer froidement un coupable de crime. Nous ne sommes pas dans l’Allemagne nazie ni dans la Syrie de Bachar El-Assad.

C’est donc insoluble. Même la perspective de recréer les bagnes et les travaux forcés n’est plus envisageable, comme ce l’était il y a un siècle. Il va falloir se résigner, la majorité des citoyens européens ne sont ni des suppôts du Front National, ni des Républicains made in USA. Et tant pis si des politicards français estiment que c’est très bien d’être ami avec Assad et Poutine.

Écrire ci-dessous une ânerie quelconque :

D
Vous savez, supprimer la peine de mort veut dire aussi que l'on croit en l'être humain, en la rédemption, au fait que l'homme peut devenir meilleur, malgré les crimes qu'il a commis. Je sais, c'est utopique, gnangnan, idéaliste, enfin il y a plein de mots pour qualifier cela.<br /> Peut-être ne suis-je pas aussi optimiste, mais au moins laisser une chance.<br /> Autre chose : la lourdeur des délits peut changer au fil du temps. Une "avorteuse" était condamnée à mort, il n'y a pas si longtemps que cela. Rien que cette idée peut faire réfléchir.
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Y
Je n’ai jamais pensé le contraire. Mais c’était l’œuvre de Pétain, qui était d’extrême droite. La peine de mort pour les auteurs d’avortement avait été abolie, et il l’a rétablie !
D
Mais ne sont-ce pas une femme (et un homme) de trop ?
Y
En fait, une seule femme, Marie-Louise Giraud, a été guillotinée pour ce motif (et aussi un homme), en vertu d’une loi promulguée pendant l’Occupation. Et Pétain lui a refusé sa grâce.
D
Oui, l'avortement est légalisé maintenant. Mais des femmes qui les ont pratiqués illégalement ont été guillotinées... Certains crimes ne seront jamais "légalisés", et c'est très bien ainsi, évidemment.<br /> Quant à la rédemption, ou au remords, ça c'est autre chose. En tout cas, la perpétuité peut donner au moins à réfléchir sur ses actes et ce qui les a générés. Et si un quelconque Eichmann ne ressent pas le moindre remords, tant pis. En tout cas, la justice et les hommes ne se seront pas mis à son niveau.
Y
Une avorteuse n’était considérée comme criminelle que par l’effet de la superstition et de l’aveuglement religieux. La preuve : aujourd’hui, le pseudo-crime est légalisé et se pratique dans les hôpitaux. Je ne vois pas que les VRAIS crimes soient autorisés par la loi. Je compte montrer qu’Eichmann n’a jamais opéré aucune rédemption. Certains criminels ne s’amendent jamais.
D
Pour la première objection, on trouverait toujours un taré pour faire ce boulot. Les gens sont plus atroces que l'on croit. Rien qu'un banal accident de la route génère un embouteillage "de curiosité". Tout le monde n'est pas Badinter, qui a été marqué profondément par une exécution capitale, ce qui lui a donné le courage militant du "plus jamais ça".<br /> Pour la seconde objection, entièrement d'accord. Rien qu'à l'idée que l'on tuerait en mon nom un quelconque être humain... surtout quand on connaît les ratés de la justice.
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Y
On aimerait que davantage de gens comprennent ces évidences. C’est pourquoi il faut sans cesse enfoncer le clou. Mais le second point, dont le sens est moral, politique et philosophique, échappe à baucoup d’individus, et j’en connais qu’il laisse indifférents.