Liberté de parole à la radio ?
Les radios mettent volontiers à l’antenne des émissions-téléphone, où « les auditeurs ont la parole », comme disent leurs animateurs, histoire de se badigeonner d’un vernis de démocratie.
Mais c’est une illusion, une charlatanerie, une tartufferie. On sait comment cela se passe : la rédaction choisit le sujet du jour, et les auditeurs sont invités à téléphoner à un standard, qui note leurs questions et les fait passer à l’animateur et à ses invités. Lesquels ont tout loisir de sélectionner celles qui les intéressent, et d’écarter celles qui gênent, sous le prétexte très peu inattendu qu’elles ne concernent pas le sujet du jour.
Parfois, certains auditeurs trichent : ils proposent une question, puis, lorsque le micro leur est ouvert, en posent une autre, qui n’était pas attendue. Ce qui donne à l’animateur l’occasion de dispenser une leçon sur ces affreux tricheurs qui « ne respectent pas les règles » et « s’avancent masqués ». Mais comment faire autrement ? Imaginez que vous vouliez poser à l’animateur une question gênante, du genre « Combien vous ont rapporté l’année dernière les “ménages” que vous avez fait au profit de telle ou telle organisation patronale ? ». Inévitablement, votre question ne passera pas le barrage. Et comme le sujet ne risque pas d’être mis à l’ordre du jour, aucune de ces émissions ne la recevra jamais.
La démocratie, à la radio, consiste surtout à laisser le soin de choisir l’ordre du jour à ceux qui sont déjà aux commandes. Pas étonnant, mais évitons de dire que la démocratie existe dans les médias.