Le grand-père de Jésus
Quoi de plus raisonnable que de fonder son existence sur la Bible ? Les informations historiques fournies par ce best-seller sont en béton armé. Prenez le Nouveau Testament, par exemple. Sur les quatre évangiles qu’il contient, et qui sont ceux que le Vatican a retenus parmi des dizaines d’autres (ceux qui ont été écartés, les « apocryphes », n’étaient pas dans la ligne du Parti... pardon, dans le canon de l’Église), on en trouve deux qui comportent une généalogie de Jésus, celui de Matthieu au tout début, celui de Luc à la fin du chapitre 3. Précisons que c’est la lignée masculine qui a été prise en compte, de père en fils, pas de mère en fille. En dépit du fait que la judaïté est censée se transmettre par les femmes !
Déjà, c’est une idée curieuse – puisque Jésus est censé être le fils de Dieu – de lui chercher des ancêtres humains mâles. Et ces deux listes, qui aboutissent à Joseph, l’époux (ou le fiancé) de Marie, n’ont d’autre but que de montrer que le célèbre roi David faisait partie desdits ancêtres, ce qui est du dernier snob. Passons. Mais, de plus, elles ne coïncident pas.
Celle de Matthieu commence à Abraham, et elle comprend quarante noms dans l’ordre chronologique, Joseph étant le dernier. Celle de Luc, en ordre chronologique inverse, commence à Adam, et elle comprend soixante-dix-sept noms, mais d’Abraham à Joseph, on compte cette fois... cinquante-sept noms, et non plus quarante !
Il serait fastidieux et parfaitement ennuyeux pour les lecteurs de comparer ces deux listes communes afin de pointer les noms qui diffèrent. Contentons-nous de ceci : selon Matthieu, Joseph est le fils de Jacob ; selon Luc, il est le fils d’Héli. Les deux évangélistes ne sont même pas d’accord sur le nom du grand-père de Jésus ! C’est dire si on peut leur faire confiance...
Comme il fallait s’y attendre, des tas de théologiens se sont évertués à trouver des explications. Aussi convaincantes que celles qui assimilent les frères (adelfos) de Jésus à des cousins (anepsios).