La Justice contre la Loi
Les Français ont la quasi-certitude que leur Justice est le service public le plus mal assuré, et Dieu sait si la concurrence est rude ! Parfois même, le fonctionnement de la Justice française est en contradiction avec la loi. Un exemple.
Nul n’ignore que la non-dénonciation d’un délit est elle-même un délit. Par ailleurs, certains délits, touchant de près à la corruption, dont nous prenons conscience depuis quelques années, avec stupeur, qu’elle fait des ravages en France, y compris dans les plus hautes sphères de l’État, ne sont jamais poursuivis.
Supposons ainsi qu’un citoyen ordinaire ait la certitude qu’une personne haut placée s’est rendue coupable de pantouflage, par exemple en quittant la direction du cabinet d’un Premier ministre, où cette personne préparait certaines privatisations décidées par le gouvernement, pour aller prendre la direction d’une banque privée, alors partie prenante dans le processus des mêmes privatisations. Et cet exemple n’est nullement inventé ! Cette personne haut placée contrevenait alors à l’article 432-13 du Code Pénal. Supposons encore que ce citoyen ordinaire se scandalise de l’absence de poursuites, pourtant rendues obligatoires par la loi, et décide de porter plainte auprès du procureur de la République et du doyen des juges d’instruction. Que se passerait-il alors ?
La première réaction, si l’on peut dire, de la Justice sera... le classement de la plainte par le procureur, qui est aux ordres du Pouvoir : on ne poursuit pas l’ancien directeur de cabinet d’un Premier minstre, surtout du fait que cette opération de pantouflage n’a pas pu être ignorée dudit Premier ministre ! Quand au doyen des juges d’instruction, il ne peut pas classer la plainte, donc il l’enregistrera et fera savoir au plaignant... qu’il doit se constituer partie civile, ce qui implique de payer un avocat, pour que le délinquant soit mis en examen.
Ainsi, le citoyen honnête devra en être de sa poche pour que la Justice fasse le premier pas, avec, comme perspective plus que probable, celle d’être débouté, astreint à payer les frais du procès, et peut-être condamné pour procédure abusive, comme cela s’est vu.
Tout commentaire serait cruel.