Les héritiers d’Hergé
Georges Remi, dit Hergé, le créateur de Tintin, s’est marié deux fois : il a divorcé en 1960, et s’est remarié en 1977 avec Fanny Vlamynck, qui travaillait comme coloriste dans ses studios. En 1983, Hergé meurt, sans enfants. Fanny hérite alors de tous les droits sur son œuvre, qu’elle gère depuis, via la Fondation Hergé (devenue les Studios Hergé) et la société Moulinsart S.A.
Fanny, qui déteste qu’on l’appelle « la veuve Hergé », s’est remariée avec un homme d’affaires britannique rencontré en 1986, Nick Rodwell, ainsi devenu, de fait, le co-gestionnaire réel de l’héritage d’Hergé. Et le couple contrôle étroitement tout ce qui concerne l’œuvre du disparu.
Il faut avouer que cela passe très mal auprès des admirateurs de Tintin, et que les rapports du couple avec les journalistes sont exécrables ; on lui reproche sa gestion paranoïaque de l’héritage artistique d’Hergé, et les mesures de protection très strictes érigées autour de son œuvre. Ainsi, lorsque la pièce Coup de crayon fut créée (elle a été jouée à Paris en 1987), la veuve Hergé avait tenté de la faire interdire, parce qu’on y voyait Tintin prendre Hergé en otage et le ligoter sur une chaise !
Rodwell avait ouvert il y a quelques jours un blog sur le site tintin.com, qui dépend de France Télévisions, et où, dans une page supprimée depuis, il a traité de « menteur » un rédacteur du « Figaro », Olivier Delcroix.
De même, à Sophie Flouquet, du « Journal des Arts », il disait : « Peut-être aviez-vous un problème avec votre père ? Peut-être votre mariage n’est-il pas aussi réussi que vous l’espériez ? [...] Dans votre article, vous additionnez les mensonges. Vous inventez des bobards. [...] Doit-on penser que, tout enfant, vous souffriez d’un problème d’identité sexuelle ? Cela pourrait expliquer votre étrange perception des autres. Une suggestion : et si vous envisagiez de retourner à l’école, question de revoir votre éducation ? ».
Enfin, il s’est attaqué de façon insidieuse à un chroniqueur de la télévision française, Albert Algoud, tintinophile très averti, et dont il dit « Albert Algoud, qui travaille pour qui le paie, est une de ces personnes qui prend un plaisir malsain et manifeste à me démolir en public », et à un de ses confrères de la chaîne publique belge RTBF, Hugues Dayez – tous deux auteurs de plusieurs livres sur Tintin. Or cela mérite un petit développement : sa page est rédigée en deux langues, français et anglais. Dans la partie française, il faisait allusion au mal-être que tous deux pouvaient ressentir, mais, affectant la discrétion, en évoquant seulement « un drame familial, qu’il ne m’appartient pas de révéler ici, car je me refuse à utiliser les méthodes de ces deux scribouillards » (Albert est père d’un garçon autiste âgé de 28 ans). Mais dans la partie en anglais, il vendait la mèche : « Both go home every evening to be confronted by a child who is autistic ». On n’est pas plus faux-cul... ni plus maladroit.
Face au tollé, le blog de ce charmant personnage a été fermé.