Anastasie Giscard
Raymond Depardon, l’auteur de cette photo ratée montrant François Hollande dans le parc de l’Élysée, n’aurait certainement pas pris une photo de Giscard, même si, aujourd’hui, celui-ci le lui demandait.
En 1974, Giscard, ministre des Finances, faisait campagne pour être élu à la présidence de la République. Il avait accepté que Depardon filme toute cette période, mais, le film une fois terminé, il ne le trouva pas à son avantage et en interdit la sortie. Sous le titre 1974, une partie de campagne, le film ne fut « libéré » qu’en... 2002 ! Mais, à l’époque, Depardon prit très mal cette interdiction, et s’en alla passer deux ans dans le désert du Tibesti, au nord du Tchad, pour y filmer la rebellion des Toubous, qui s’opposaient par les armes au pouvoir central de N’Djamena. Et leur chef ayant pris en otage une ethnologue française, Françoise Claustre (ils la retinrent trente-trois mois), Depardon put l’interviewer. Avant, une fois revenu à Paris, d’obtenir que TF1, qui n’était pas encore Télé-Poubelle mais la première chaîne nationale publique, diffuse l’interview.
Or madame Claustre s’y plaignait d’avoir été abandonnée par tous les responsables français, ce qui était à peu près exact, et Giscard prit la chose pour lui. Que croyez-vous que fit ce président d’un pays qu’on supposait démocratique ? Il fit jeter Depardon en prison pour deux mois, sous l’accusation bidon d’intelligence avec l’ennemi !
Vous ne me croyez pas ? Mais il y eut un autre exemple de ce Giscard prouvant par la lettre de cachet son ascendance royale (via une soubrette qui avait été la maîtresse épisodique de Louis XV).
En 1981, avant l’élection présidentielle qui devait voir la chute de Giscard, l’écrivain et journaliste Roger Delpey, qui était un ami de Bokassa (président puis « empereur » du Centrafrique, et devenu l’ennemi mortel de Giscard qui lui avait pris sa femme Catherine), publia un livre intitulé La manipulation, à la fois une défense de Bokassa, accusé sans preuve d’avoir fait tuer des étudiants de son pays, et un pamphlet contre Giscard. Que fit Giscard ? Il fit arrêter Delpey et le jeta lui aussi en prison. Prétexte : on l’avait vu sortir de l’ambassade de Libye à Paris, DONC il espionnait la France au profit de Kadhafi !
Delpey croupit en prison pendant sept mois, puis publia Prisonnier de Giscard, en 1982. Monsieur Giscard est un grand démocrate.