Au secours ! Hadopi en danger !
Le 5 mars dernier, et je crois que j’en avais parlé ici, French Data Network (FDN), un fournisseur associatif d’accès à Internet, avait déposé au Conseil d’État un recours contre le dernier décret d’application de la loi Hadopi, argüant que l’avis de l’ARCEP n’avait pas été demandé, en dépit des termes de la loi. Ce recours pourrait entraîner l’annulation dudit décret.
Or, hier matin 27 juillet 2010, un nouveau décret d’application de la loi Hadopi est paru au Journal Officiel, et il risque le même recours sans que FDN ait à bouger un doigt. En effet, si le Conseil d’État annule le premier décret, le second sera aussi annulé, car il ferait référence à un décret annulé !
Le gouvernement serait ainsi obligé de repartir de zéro et de : 1. republier un clone du premier décret ; 2. solliciter cette fois l’avis de l’ARCEP qu’il avait zappé précédemment ; 3. publier une nouvelle version du second décret, mais corrigée pour tenir compte de tous ces épisodes, qui remplacerait celui publié hier.
Naturellement, tout ça va prendre un certain temps, comme disait Fernand Raynaud à propos du canon du fusil dont on attendait qu’il refroidisse.
Mais ce n’est pas tout. En effet, il existe un certain article 40 du Code de procédure pénale, qui dit que « toute autorité constituée, tout officier public ou fonctionnaire qui, dans l’exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d’un crime ou d’un délit est tenu d’en donner avis sans délai au procureur de la République et de transmettre à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs ». Or, lors de son audition à l’Assemblée Nationale, la présidente de la commission de protection des droits de l’Hadopi avait jugé qu’elle n’était pas soumise à l’article 40, parce que l’infraction de négligence caractérisée n’est justement constituée qu’au moment où elle décide de transmettre au parquet, position qui avait été jugée très contestable et susceptible elle aussi d'être invalidée. Rapprochez cette déclaration de l’intention qu’a manifesté la Commission Hadopi de transmettre au procureur... 125 000 saisines (traduisez par « plaintes ») par jour ! Il va être heureux, le procureur.
Il y a d’autres absurdités dans cette affaire Hadopi, mais c’est suffisant pour aujourd’hui. Affaire à suivre, conclurait un journaliste de radio-télé.