Embouteillages

Publié le par Yves-André Samère

Je vis à Paris depuis quelques années, et l’expérience que j’ai retirée de ce séjour aurait dû me servir de leçon : à Paris, TOUT LE MONDE ment !

Ce que je vise, en fait, c’est cette double habitude consistant à ne jamais arriver à l’heure à un rendez-vous, et à doubler par un mensonge cette marque de muflerie : on est en retard parce qu’il y avait des embouteillages.

Ah, le coup des embouteillages !... Autrefois, on appelait cela « les embarras de Paris » (Boileau en a parlé), mais cela revenait au même, on était en retard dans toutes les circonstances.

Aujourd’hui, un ami m’a fait le coup. Comme nous étions convenus de déjeuner ensemble, il me téléphone à onze heures du matin – notez bien l’heure. « Je prends ma douche, me dit-il, et j’arrive. Rendez-vous en bas de chez toi ». Comme il habite dans le seizième arrondissement et moi dans le premier, je calcule qu’en scooter, avec la voie express, cela devrait lui prendre une demi-heure, guère plus. Or il ne s’est pointé qu’au bout... d’une heure vingt. Oui, je sais, les embouteillages.

Il ne vient à l’idée d’aucun Parisien qu’on peut compenser cet inconvénient en partant plus tôt ; et que, si vraiment être à l’heure prévue est impossible, on pourrait au moins s’abstenir d’annoncer un pronostic jugé par avance irréaliste. Nul n’est obligé d’imiter Jacques Mellick, maire de Béthune : dans l’affaire du match de foot (truqué) de l’Olympic de Marseille contre l’équipe de Valenciennes, il avait soutenu devant un juge que, le 17 juin 1993, il se trouvait dans le bureau de Bernard Tapie, à Paris, à l’heure où l’entraîneur de Valenciennes jurait avoir rencontré Tapie ailleurs, rencontre que l’honnête Nanard niait parce que ce témoignage le mouillait. Or Mellick, une heure et douze minutes avant cette prétendue rencontre parisienne, se trouvait à Béthune. En voiture, ces quelques 260 kilomètres ne pouvaient être parcourus en moins de trois heures... Mellick y gagna d’être ridiculisé, et condamné pour faux témoignage à six mois de prison avec sursis.

Je réclame donc une peine identique pour tous les Parisiens qui arrivent en retard à un rendez-vous.

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