Invitation sur les Champs-Élysées

Publié le par Yves-André Samère

Bien sûr, qu’il ne fallait pas inviter les troupes africaines sur les Champs-Élysées ce matin ! Encore moins les dictateurs qu’elles ont aidé à s’installer là où ils sont, généralement après un coup d’État et l’assassinat de leur précédesseur (qui d’ailleurs avait fait la même chose), et où ils ont coutume de rester des dizaines d’années d’affilée. Tenez, voyez le Burkina Faso, par exemple : son président est Blaise Compaoré, et il est en place depuis le 15 octobre 1987, après le renversement, via un putsch qu’il avait monté, de son « ami » le président Thomas Sankara, le seul dirigeant africain de l’Histoire qui ait vécu simplement (il habitait une villa d’un quartier populaire et conduisait une R5), lequel a laissé la vie dans le putsch. Et je vous épargne les autres.

Certes, Sarkozy ne peut pas savoir tout cela... Et puis, ne faisons pas d’angélisme, il est arrivé à la gauche de faire pis. Par exemple Mitterrand et son invitation à Hissène Habré – voir plus loin. Il est vrai qu’Hissène Habré était un hôte tout à fait reluisant, puisque c’est lui qui a inventé la prise d’otage à titre politique. Mais la chose vaut d’être racontée succinctement.

Habré dirigeait, au Tchad, une faction rebelle hostile au président en titre, François Tombalbaye – une canaille, du reste. Une autre faction rebelle était dirigée par Goukouni Oueddeye, et ces deux-là, réfugiés dans le désert, au nord du Tchad, se faisaient la guerre, mais c’est Habré et ses troupes qui dominaient. Puis Habré eut l’idée d’enlever une Française, une ethnologue parfaitement honorable, madame Françoise Claustre, afin de l’utiliser comme otage. Il la garda pendant trente-trois mois.

En France, à cette époque, le président était Giscard, qui envoya au Tchad un négociateur, le commandant Galopin, pas très bien choisi d’ailleurs, puisqu’il avait laissé un mauvais souvenir en Afrique pour des raisons qui dépassent le cadre de ce récit. Galopin était chargé de demander quelles étaient les exigences du preneur d’otage. Or, en guise de réponse, Habré le fit torturer, puis fusiller ! Et il exigea de l’argent et des armes, que la France lui fournit, devant tant d’amabilité.

Notons que, plus tard, Goukouni et Habré furent tous les deux présidents de leur pays, Tombalbaye ayant évidemment été assassiné, pour ne pas changer. Madame Claustre fut libérée, elle, sur l’intervention de Kadhadi, qui subventionnait la rébellion.

Mais le plus intéressant est ceci : le 14 juillet 1987, Hissène Habré, premier preneur d’otage de l’Histoire contemporaine, devenu dictateur au pouvoir, tortionnaire et assassin, était présent dans la tribune officielle, sur les Champs-Élysées, lors du traditionnel défilé militaire. Invité par Mitterrand, président de la République. On a les invités qu’on mérite. Rappelons qu’il n’est pas d’usage qu’un chef d’État étranger assiste à cette cérémonie, et que ce rarissime honneur fut refusé, quatre ans plus tard, au président des États-Unis, George Bush père, qui avait souhaité saluer les troupes françaises ayant participé à sa Guerre du Golfe. Il dut mettre sa demande dans sa poche, avec son mouchoir par-dessus.

Écrire ci-dessous une ânerie quelconque :

Y
<br /> Parce que les gouverneurs de nos colonies enlevaient des Français pour demander une rançon ? J’ai dû rater un épisode...<br /> <br /> <br />
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