La chasse aux clichés

Publié le par Yves-André Samère

Lorsque les bonnes fées se sont penchées sur mon berceau juste après ma naissance à Neuilly, ma marraine Clochette décida de me donner une profonde aversion pour les clichés : « Tu haïras le vocabulaire journalistique à la noix », susurra-t-elle à mon oreille déjà si attentive, « et tout particulièrement les clichés ». Depuis, traquer les clichés et autres expressions toutes faites est devenu une des missions que la Divine Providence m’a confiées, tâche à laquelle je me consacre chaque jour que Dieu fait (et Il sait s’Il en fait). Soit dit en passant, je supplie mes millions de lecteurs de bien vouloir me signaler s’il m’arrive, à moi aussi, de commettre des clichés. Mais ça m’étonnerait.

C’est pourquoi j’aurais fortement conseillé fortement, s’il n’avait pas disparu, la lecture d’un excellent article paru sur le site de Rue89, un site d’informations beaucoup plus sérieux que le Bakchich.info dénoncé ici récemment. Cet article était dû à Yann Guégan, qui déclarait qu’« entre deux coquilles à chasser [dans les articles de Rue89], je me pose pas mal de questions sur la langue française, ses incongruités et ses anachronismes, les débats passionnés qu’elle suscite et les évolutions de la société qu’elle marque », ce qui, les fées en soient remerciées, est aussi l’une de mes marottes, et pas celle qui agace le moins mes amis. Ce Guégan doit être un sujet d’élite, comme disait le père Muche dans Topaze.

Son article, entre autres, vous aurait rappelé – car vous vous en doutiez déjà – que les dix clichés les plus répandus dans la presse française sont les suivants :

- la cerise sur le gâteau

- le vent en poupe

- grincer des dents

- la cour des grands

- un pavé dans la mare

- la croisée des chemins

- caracoler en tête

- l’ironie de l’histoire

- revoir sa copie

- attendu au tournant

Je n’ai pas oublié le temps où mon frère et moi nous nous esclaffions ensemble à cette « cour des grands » où les politiques « montaient au créneau » histoire de « faire leur rentrée ». Rien n’a changé, ça c’est seulement aggravé.

NB : j’ai déploré dans le palmarès l’absence de cette expression que j’affectionne particulièrement, état de choc. Il suffit qu’un événement fâcheux se produise dans une localité quelconque pour que le zozo de la radio termine son papier par la phrase rituelle : « Ce soir, toute la population de Fouilly-les-Oies est en état de choc ». On s’en doute, le zozo n’a pas la moindre idée de ce que peut un véritable état de choc, et qui n’a rien à voir un sujet de conversation pour le Café du Commerce. Mais il faut bien dramatiser un peu les faits-divers, si on veut fidéliser le public, comme ils disent aussi.

Écrire ci-dessous une ânerie quelconque :

D
<br /> Je me disais bien que cela vous ferait plaisir !<br /> <br /> <br />
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Y
<br /> Ouais... Ajoutons-y « incontournable », le pire de tous.<br /> <br /> <br />
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D
<br /> Et l'expression de saison "le chassé-croisé" des vacanciers. Incontournable.<br /> <br /> <br />
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Y
<br /> « Déjanté » est aussi un de mes favoris. Il a mieux résisté à l’usure que son collègue « décalé ». Attendons le prochain...<br /> <br /> Et, si je puis me permettre à mon tour, j’ai un petit faible pour celui, quoique un peu détourné : « la crise sur les cathos ».<br /> <br /> <br />
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L
<br /> Si je puis me permettre :<br /> l'ire honnie du sort<br /> qu'a racolé en tête<br /> levant en poupe<br /> a tendu en tournant<br /> Avec mes excuses...<br /> <br /> <br />
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L
<br /> En effet, c'est agaçant comme : noriah d'ambulances (devenu rare) particulièrement déjanté (à la mode) entendre son directeur en cravate dire : aller au charbon ou mouiller la chemise... et le pire<br /> et insuportable : l'otage a été exécuté au lieu de : on l'a assassiné !!! (sans jugement et sans appel). le dernier a le don de m'énerver.<br /> <br /> <br />
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