La critique, tendance psy
Ce qui me frappe chez les critiques de profession, cinématographiques bien sûr, mais aussi tous les autres, c’est que, la plupart du temps, ils jugent une œuvre d’après les intentions qu’ils supposent chez leurs auteurs. En clair, voici ce qui se passe – fréquemment – dans la tête du critique : « Tel auteur a voulu dire ceci, c’est une idée que je partage, donc j’estime que son film (ou son livre, ou sa pièce, etc.) est bon ».
L’ennui, c’est que, souvent, l’auteur n’a rien voulu dire de tel, qu’il pensait à tout autre chose, par exemple à raconter une bonne histoire que quelqu’un d’autre lui avait apprise, et que les circonstances de la fabrication de l’œuvre ont compliqué encore l’affaire.
On connaît cet exemple magnifique d’Orson Welles adaptant Othello, de Shakespeare, pour le cinéma. À la sortie du film, les critiques dans leur ensemble s’étaient extasié sur le fait que Welles avait situé une scène capitale de son film dans un bain maure. Et de décrypter la scène pour y trouver on ne sait quels symboles, avec une préférence pour les significations psychanalytiques, lesquelles ont la préférence des « intellectuels de gauche bien parisiens », comme disait Desproges.
Je connais assez bien l’œuvre de Welles, et je n’ignore pas qu’il n’avait guère la psychanalyse en tête ; pour tout dire, franchement, il s’en foutait. La vérité sur cette scène, c’est lui-même qui l’a donnée plus tard : il n’avait plus d’argent pour faire fabriquer les costumes de la scène. Alors, il a fait « revêtir » à ses acteurs de simples serviettes de bain, et il a tourné la scène dans un hammam d’Essaouira (ex-Mogador), petit port marocain où se tournait la plupart des scènes d’extérieurs !
Et qui avait l’air fin ?
(Je ne sais pourquoi, cette petite histoire me fait penser au tableau de Boronali)